Les Chroniques de l'Imaginaire

Le palais de l'amour (La Geste des Princes-Démons - 3) - Vance, Jack

Attel Malagate, celui qu'on nomme le prince des étoiles, et Kokor Hekkus, le maître de la terreur, sont désormais morts. Viole Falushe sera le suivant, c'est du moins la promesse que s'est fait à lui-même Kirth Gersen. De tous les Princes-Démons, Viole Falushe ne sera cependant pas le plus facile à éliminer : s'il est connu dans toute la galaxie pour ses crimes et ses goûts raffinés en matière de vice, rares sont ceux à connaître le visage de cet expert en déguisement aux personnalités multiples

Enfin ! La geste des princes-démons est rééditée en poche ! Pour les lecteurs qui ne connaissent pas encore cette formidable fresque de science-fantasy, disons pour faire simple quelle est sans doute l'oeuvre maîtresse de Vance, ce qui n'est pas peu dire, et sans doute aussi son plus célèbre écrit de science-fiction (les amateurs de fantasy pure connaîtront peut-être plus Le cycle de Lyonesse ou Cugel ). Les chroniques des précédents volumes seront rapidement disponibles sur les Chroniques de l'Imaginaire. Pour ceux qui souhaitent découvrir l'oeuvre selon l'ordre chronologique, je vous conseille d'attendre la chronique du Prince des Etoiles (le 1er volume), rédigée par mes soins, et de ne pas lire ce qui suit. Veuillez pardonner votre chroniqueur dévoué de commencer par le troisième volume, n'y voyez que pure contingence matérielle.

Le palais de l'amour est le roman central de La Geste des Princes-Démons, une sombre histoire de vengeance où l'action et la suspens sont les ingrédients majeurs. Non pas qu'il soit le meilleur à ce niveau, établir une hiérarchie entre différentes facettes de l'excellence serait dépourvu de sens mais parce que c'est peut-être là que se décident les choix les plus importants pour Kirth Gersen, parce que c'est à ce moment que sa quête de vengeance prend une tournure moins naïve. Kirth Gersen agit dorénavant en averti. Il connaît, d'une certaine manière, l'impasse à laquelle doit aboutir son serment. Il sait maintenant, même sil ne se l'avoue pas tout à fait, que l'assassinat des cinq Princes-Démons n'est pas une fin en soi, que son existence devra ensuite se poursuivre, bref, que le plus dur n'est pas d'accomplir une promesse, mais de lui survivre.

En dehors de cette spécificité, Le palais de l'amour répond à toutes les attentes des amoureux de la littérature vancienne. Nous avons là une ballade au double sens du terme : une promenade exotique aux quatre coins d'un univers baroque et contrasté ; un récit épique, une course poursuite à la recherche d'un méchant aussi insaisissable que l'éther. Kirth Gersen visite Sarkovy, la planète des maîtres-poisons. Il s'aventure dans la Cité des Esclaves, rencontre un artiste-poète décadent, enquête sur le mystérieux palais de l'amour où dit-on se pratique une curieuse version de l'amour courtois. Pour mettre la main sur son redoutable ennemi, il n'aura pas trop de sa fortune nouvellement acquise (voir La machine à tuer), de ses relations (parfois peu recommandables) et de cette formidable vivacité d'esprit qui le caractérise. Comme à son habitude, Vance parvient à nous captiver dès les premiers instants. Les évènements se succèdent, les rebondissements, plus inattendus les uns que les autres, s'enchaînent avec la plus grande cohérence selon un rythme de plus en plus effréné.

Bref, un roman comme on n'en fait plus, foisonnant, vivant, dynamique, exaltant.

P.S : un petit coup de gueule pour la couverture, indigne d'un roman de cette ampleur.