Les Chroniques de l'Imaginaire

Monget, Yannick

Yakumo : Commençons par la question rituelle : peux tu te présenter aux lecteurs des Chroniques de l'Imaginaire ?

Yannick Monget : Eh bien avant toute chose, mon activité principale est la lutte pour la protection de l'environnement, je suis délégué général du groupe Ankaa qui a été créé récemment sous le parrainage de l'institut européen d'écologie, en la personne de son président, Jean-Marie Pelt. Je suis également à la tête d'une petite société (E.I.C, Evolutia Images Creation) qui conçoit principalement des images numériques sur des thèmes scientifiques (paléontologie, astronomie, et bien sûr également l'environnement). Depuis peu, enfin, je porte cette casquette d' "écrivain" puisque j'ai commencé il y a quelques années à me mettre à l'écriture.

Y : Peux tu nous en dire plus sur le groupe Ankaa et l'E.I.C. , organisme que je n'ai pas la chance de connaître ?

YM : Ankaa a été fondé l'année dernière, c'est un organisme tout jeune, que nous sommes en train de développer. Si j'en suis le fondateur et le Délégué Général, la présidence est assurée par l'un de mes amis, Romuald Dubois, qui avait dès le début toute ma confiance pour occuper cette place.

Ankaa agit principalement sur le front de l'action, et développe des projets environnementaux dont certains sont de très grande envergure. C'est le principal d'entre eux, (dont je ne peux pas encore parler pour l'instant) que l'Institut Européen d'Ecologie parraine. Les actions d'Ankaa ont principalement pour but de développer les énergies nouvelles, dites « propres » au sein de notre société et de tout faire pour tenter de rapprocher l'homme de la nature, sans le priver de ses technologies, (il ne s'agit pas de revenir à l'âge de pierre) mais, au contraire en en développant de nouvelles qui lui permettent de vivre enfin en adéquation avec sa planète.

Quant à E.I.C, c'est une entreprise qui agit sur un plan différent, celui de la sensibilisation. Elle développe différents projets destinés à expliquer au grand public quels sont les enjeux de la crise environnementale qui menace sérieusement l'avenir de l'humanité, mais également celui de centaines de milliers d'autres espèces. Ces projets ont également pour but d'informer le public sur l'état actuel de nos connaissances, principalement dans les domaines de l'évolution de la vie (la paléontologie) et de l'univers (l'astronomie, l'astrophysique). Actuellement, nous travaillons sur un projet touchant à l'évolution des espèces avec les Editions Atlas, ainsi que sur plusieurs expositions scientifiques sur Metz et Marseille.

Y : En plus d'être un écologiste convaincu, tu es également un scientifique au niveau élevé. Quels études as-tu faites en archéologie et en physique, pour pouvoir écrire un livre aussi technique que Rencontre ?

YM : Cette question me fait très plaisir, car justement, non, je ne suis pas scientifique « au niveau élevé » et je n'ai pas fait d'études ni en archéologie, ni en physique. En fait, après ma terminale S à Metz, j'ai fait une année de prépa (Maths sup bio), puis j'ai regagné l'Université Henry Poincaré de Nancy où j'ai fait une année de biologie générale puis une année de géologie pour passer mon DSTU (Deug en Sciences de la Terre et de lUnivers). Mais je me suis arrêté là. J'ai quitté la fac rapidement, pour raison « d'incompatibilité » avec le système, dirons-nous.

En parallèle, j'ai fait la connaissance d'un paléontologue, Eric Buffetaut, quelqu'un de formidable et d'extrêmement gentil qui ma accueilli comme fouilleur bénévole sur un site de recherche du sud de la France, à Cruzy (Hérault). J'ai pu ainsi travailler plusieurs saisons de suite aux côtés de plusieurs chercheurs sur les couches du crétacé supérieur de la région. Les sites y étaient dune richesse incroyable, et des découvertes importantes y ont été faites (dinosaures, reptiles volant, crocodiles, tortues, poissons et oiseaux). Cette période fut pour moi très enrichissante, tant au niveau scientifique où je touchais réellement du doigt ce que j'appelle la « vraie recherche », sur le terrain, dans la poussière, que sur un plan humain ou je m'y suis fait de vrais amis. Par la suite j'ai découvert un site fossilifère extrêmement riche, datant du Trias, dans ma région, en Lorraine, un site que je souhaite bien faire exploiter dans les années futures.

Mais au bout du compte, je ne suis pas un chercheur, je suis simplement un peu touche à tout. Les sciences m'intéressent en général et je lis beaucoup de livres sur ces sujets, d'Hubert Reeves, à Stephen Hawking, en passant par Yves Coppens, et Jack Horner. Enfin, en plus de ces modestes connaissances que je tente d'acquérir au fil de mes lectures, je fais beaucoup de recherches sur les sujets dont je traite précisément dans mes livres. L'important est de rendre plausibles ces histoires, d'une part, mais aussi de les rendre ludiques, en faisant passer agréablement un certain nombre d'informations scientifiques, car je trouve que les découvertes scientifiques de ces dernières années sont absolument passionnantes et méritent d'être connues du grand public.

Pour l'écriture de Rencontre je me suis ainsi plongé pendant plusieurs mois dans des livres et revues scientifiques traitant de la théorie des cordes, du multi-univers, (pour les passages parlant d'astrophysique) ainsi que dans des récits d'Yves Coppens et de Bernard Buigues (pour les parties traitant des découvertes paléontologiques faites par les protagonistes en Arctique). Sans compter la littérature « militaire » que je n'ai pas l'habitude de consulter mais qui m'a été d'une grande aide pour les passages traitant des apparitions d'ovnis.

Enfin, je demande toujours à de vrais chercheurs, du C.N.R.S cette fois-ci, de vérifier ce que je raconte pour relever d'éventuelles erreurs.

Y : Justement, durant Rencontre, tu exposes un bon nombres de théories audacieuses, si bien qu'on ne sait plus où s'arrête le domaine scientifique et où commence la fiction. Quels idées as tu puisées de tes recherches et quels sont celles venant de ton imagination ?

YM : En fait, tous les discours des scientifiques du roman sont tirés de vraies théories, aussi incroyables certaines puissent-elles paraître. Seuls les évènements sont inventés bien que certains (je pense aux apparitions d'ovnis) soient inspirés de faits réels.

En astronomie, la théorie des univers bulles ou des multi-univers est une véritable théorie. La théorie des cordes également. Les discours qui traitent de la vie dans l'espace font référence aux discours que tiennent 99 % des exobiologistes aujourd'hui. Pour la petite histoire, l'action devait initialement se passer en 2004 et la sonde qui se pose sur Titan à la fin du roman est elle-même inspirée de Cassini Huygens dont on a beaucoup parlé ces dernières semaines.

En paléontologie, les découvertes d'animaux préhistoriques dans la glace du pôle ont été inspirées par les découvertes ces dernières années de plusieurs mammouths, entièrement conservés (avec la chair et la toison) dans le permafrost sibérien par l'équipe de Bernard Buigues. Certain scientifiques souhaitent d'ailleurs vraiment cloner ces animaux et les réintroduire dans ces régions.

En archéologie, Palenque, existe vraiment, et les descriptions faites des temples, des pierres font référence à la vraie cité, exceptée la pyramide découverte par les archéologue français au début du roman qui a été ajoutée. (Mais qui sait il reste tant de ruines à dégager des mailles végétales de la forêt tropicale).

En fait, si les évènements venaient à se produire aujourd'hui, il est probable que les scientifiques, les militaires et les politiques réagiraient comme les protagonistes du roman. (L'attitude du gouvernement Bush ces dernières années me conforte d'ailleurs dans cette idée, le désir d'utilisation d'armes de destruction massive leur aurait sûrement effleuré l'esprit).

Y : J'ai l'impression que tu es assez négatif envers l'espèce humaine, c'est d'ailleurs relativement visible dans Rencontre où tu lui reproches certains désastres écologiques comme la sixième grande extinction par exemple. Tu considères-tu comme un « anti humaniste » ?

YM : Non, pas un antihumaniste, ou sinon il faudrait considérer l'existence de deux humanités.

L'une que j'execre, effectivement, qui m'inspire un profond dégoût : il s'agit en l'occurrence de celle qui, égoïste, pense être ce que la nature a fait de mieux dans l'univers et saccage son environnement sans état d'âme aucune. Cette humanité est responsable de la crise environnementale dont nous sommes entièrement responsables aujourd'hui et qui nous menace nous-même, mais également des centaines de milliers d'autres espèces de cette petite planète. Jamais dans l'histoire de la vie, une espèce n'a causé autant de désastre et, ayant étudié l'évolution de la vie, je pense être bien placé pour le dire. Même dans l'histoire des hommes, aucune civilisation na causé autant de catastrophes.

Mais il existe également une autre humanité. Il s'agit dune humanité Humaniste. Une humanité qui croit en l'homme, qui croit en ses propres rêves, et qui veut croire qu'ils sont réalisables. C'est de cette humanité dont nous avons besoin aujourd'hui.

Ne nous méprenons cependant pas, tout n'est pas blanc ou noir, les hommes ne sont pas bons ou méchants. Ces deux humanités sont probablement toutes deux présentes en nous, seule leur part varie d'un individu à l'autre et confirme que le monde, en tout cas l'humanité, puisque c'est ce dont il est question ici, n'est que nuances de gris.

Dans Rencontre, j'ai voulu sonder ces deux aspects de notre espèce, et au final, sans pour autant dévoiler la fin du roman, je pense montrer justement que le positif peut toujours l'emporter.

Je ne pense pas que montrer des Israéliens et Palestiniens devenir les meilleurs amis du monde, montrer des peuples du monde entier travailler ensemble à la recherche de leur origine commune puisse être considéré comme antihumaniste. Je pense que critiquer la guerre en Irak, l'utilisation par de nombreux pays d'armes de destruction massives, ou encore les talibans, ne fait pas de moi un anti-humaniste, mais plus probablement un anti-imbécile.

Y : Il est vrai que tu développes ces deux humanités dans Rencontre, par contre, j'ai l'impression que tu considère que l'une, celle qui est nuisible gouverne le monde par le biais des politiques et des grands industriels. Es-tu tout de même positif quand à l'évolution de l'humanité dans ces prochaines années ?

YM : Ce livre a été écrit sur plusieurs années, entre 1998 et 2000, il me semble que les récentes élections américaines ainsi que les précédentes m'ont donné raison... Ce n'est pas de la science-fiction me semble-t-il, que de montrer un monde dirigé de cette manière. Il n'y a d'ailleurs plus de frontière aujourd'hui entre les politiques qui dirigent le monde et les grands industriels : dans le gouvernement Bush, tous les hauts responsables de la nation américaine portent cette double casquette, puisque avant d'être des hommes politiques, ce sont tous ou presque des membres de grands groupes pétroliers, ou travaillant dans l'armement. Cependant, je n'attaque pas les États-Unis pour autant dans mon livre, et le président américain y a même développé une certaine conscience (Je serais d'ailleurs tenté de dire que c'est le seul aspect de science-fiction du roman, mais je serais mauvaise langue, il y a eu de grands présidents américains, même républicains, comme Abraham Lincoln par exemple, alors il est toujours possible d'imaginer que de tels hommes se retrouveront à nouveau aux commandes des grandes puissances de ce monde dans l'avenir).

Pour ce qui est de l'évolution de l'humanité, je crois que cette évolution ne peut se faire que dans un sens. Si l'humanité ne se réveille pas et n'évolue pas positivement dans les années à venir, elle s'éteindra, c'est aussi simple que cela. Comme le dit Hubert Reeves, le critère de permanence d'une espèce est très simple : seules survivent les espèces qui établissent un rapport harmonieux avec leur environnement, avec l'écosystème où elles sont inscrites. Il faut un bon rapport d'échange : donner et recevoir. Cela porte le terme de symbiose en biologie. Rappelons que 99 % des espèces apparues sur Terre depuis 3,8 milliards d'années ont disparu, nous ne serions donc pas les premiers être menacés d'extinction, loin de là...

Y : En lisant Rencontre, on a l'impression que tu es très influencé par l'écrivain Bernard Werber, tu fais même parfois référence aux Fourmis. Apprécies-tu cet écrivain ?

YM : Oui, j'adore Werber, il fait partie de mes auteurs préférés, comme Michael Crichton et René Barjavel. C'est un auteur à part, qui a su créer son propre style. Le succès des Fourmis est vraiment mérité, mais personnellement, mon préféré restera celui qui, paradoxalement à le moins marché : les Thanatonautes. Nous nous sommes « auto-dédicacés » d'ailleurs nos derniers ouvrages respectifs le mois dernier, lors d'un salon où nous nous sommes retrouvés un à côté de l'autre. Il y présentait son dernier roman Nous les Dieux et moi Rencontre. Il m'arrive souvent de citer les auteurs avec lesquels je partage un certain nombre d'idées, Werber en fait partie et je le cite effectivement dans Rencontre, ce qu'il a apprécié.

Y : Un autre écrivain, Nicolas Cluzeau a également développé une théorie sur le multivers proche de la tienne, dans sa série paru chez Nestiveqnen : Le Dit de Cythèle. Connais tu cet auteur ? Et si non, connais-tu d'autres auteurs qui ont développé des théories similaires ?

YM : Je ne connais pas Cluzeau, non. En fait, depuis quelques années, rares sont les moments où je peux lire des romans, mes lectures tournent aujourd'hui pas mal autour de l'environnement, de la nature et de certains domaines scientifiques pour maitriser au mieux les sujets dont je traite et sur lesquels je me suis engagé. Je ne connais donc pas d'autres auteurs traitant de ces sujets. Mais j'imagine qu'il doit bien en avoir.

Y : En dehors de l'écriture , de la défense de l'environnement et du monde scientifique, quels sont tes autres centres d'intérêt ?

YM : Il me semble que tout cela fait déjà pas mal. J'aime évidemment la nature, je fais également de la sculpture, un peu de musique et de l'infographie, je vais d'ailleurs sortir l'année prochaine un livre d'images en plus de mon prochain roman qui devrait quant à lui, sortir en fin d'année.

Y : Justement, parles nous de ce prochain livre, de quoi parlera-t-il ?

YM : Pour l'instant je ne peux pas en dire grand-chose, seulement que le titre du roman est GAIA, et que j'espère le voir sortir pour l'automne prochain. Il s'agit d'un thriller, avec beaucoup de suspens et d'action, de la première à la dernière page. Personnellement, de tous les romans que j'ai écrits, c'est celui qui m'aura demandé la plus grande rigueur dans la construction, et dont je suis le plus fier. Il est plus court que Rencontre, et vous pouvez imaginer qu'il parle d'environnement, bien entendu. Aucun passage de ce livre n'est gratuit, tout à son importance, chaque phrase, pratiquement chaque mot à une raison d'être. Ce fut une écriture très difficile qui m'a imposé de travailler plusieurs mois à plein temps dessus, mais ce travail fut vraiment plaisant, et je suis très heureux du résultat. J'ai eu d'excellents retours de toutes les personnes qui l'ont déjà lu.

Y : Pourra-t-on te retrouver dans un ou plusieurs salons, ces prochains mois pour une séance de dédicace ?

YM : Mon emploi du temps m'empêche de participer à beaucoup de salons, néanmoins, je serai présent au Printemps du Livre Lorrain, qui se passe près de Metz le week-end du 22 Mai. Sinon, je suis invité les 18 et 19 Juin prochain avec, entre autres, Warwick Davis (Willow) et Anthony Daniels (C3PO dans la Guerre des Etoiles) à la Convention C3polis qui se déroulera également près de Metz (comme quoi il se passe beaucoup de chose dans l'Est de la France).

Il y a un projet d'exposition « scientifique » sur les liens entre l'univers de Lucas et les sciences. C'est un sujet qui m'intéresse beaucoup, car dans ses nouveaux épisodes, Lucas, qui reste un visionnaire et un avant-gardiste, y a mis en scène un monde qui devrait préfigurer à mon sens l'avenir de la Terre, à la fois respectueux de l'environnement, et très avancé sur un plan technologique (je pense au monde de Naboo). L'importance de la nature et de la symbiose avec l'univers qui nous entoure est une idée très présente dans ses films (il n'y a qu'à écouter les dialogues avec Yoda). Le terme Symbiose, y est d'ailleurs employé à maintes reprise par les personnages, d'Obi-Wan, à Qui Gon, en passant par Yoda qui, en plus de l'utiliser, en explique le sens et l'importance. Ce serait donc l'occasion rêvée de faire passer un message écologique et scientifique d'une manière pour le moins ludique.

Pour les autres projets, je ne peux que vous inviter à consulter mon site officiel pour vous en tenir informé, car ils ne seront dévoilés que progressivement.

Y : Justement, peux tu rappeler l'adresse de ton site Internet ainsi que son contenu ?

YM : L'adresse du site est on ne peut plus simple : www.yannickmonget.org, il s'agit d'un site portail à partir duquel on pourra accéder aux sites d'E.I.C et d'Ankaa (qui sont en train d'être remis complètement à jour).

Le site est tout neuf, et il se peut qu'il y ait encore quelques dysfonctionnement que nous essaierons de réparer au plus vite. Progressivement, dans les semaines et mois prochains, le site sera enrichi de nouvelles rubriques qui viendront compléter les premières pages déjà installées. (Le site de Rencontre a, quant à lui, été entièrement redessiné et se trouve réincorporé à mon site officiel.)

Y : Je crois qu'on commence maintenant à bien de connaître, avant de clore cette entretien, as-tu un dernier mot à donner à mes lecteurs ?

YM : Eh bien vis-à-vis de Rencontre, pour ceux qui ont lu ces lignes et qui projettent de lire le roman, je ne peux qu'espérer que cette aventure les passionnera, et quelle les poussera à se poser des questions sur le monde dans lequel ils vivent, ainsi que sur notre société. En ces temps sombres, il est bon de savoir prendre du recul, de s'interroger sur ces questions existentielles que je pose dans Rencontre, et surtout de rêver. Continuez de rêver, c'est le moteur de toute avancée, de tout progrès, de toute vie.