Les Chroniques de l'Imaginaire

Orval (Orval - 1) - Servais, Jean-Claude

Nous sommes en l'an 499, à quelques kilomètres de Rome. Un seigneur bon nommé Benoît arrive à cheval chez de braves gens et demande à boire pour sa bête. Les hôtes lui demandent de venir prestement voir le fils de la famille, au plus mal depuis dix jours à cause d'une maladie. Benoît ne voit pas bien ce qu'il peut faire, lui qui est plus occupé par les questions de religion que par la médecine. Pourtant, un véritable miracle semble se produire : au moment ou Benoît pose la main sur le front de jeune garçon endormi, celui-ci sort enfin de son sommeil et trouve les bras de ses parents, lesquels nomment immédiatement leur sauveur Saint Benoît...

Et Benoît aura ainsi déclenché une véritable marée humaine, qui amène les infirmes et les mourants à l'église où il officie, ici en Italie. Bien vite, Benoît décide de vivre seul, dans la pauvreté et en harmonie avec la nature : il se met en tête d'écrire des préceptes, lesquels sont les fondements de la vie monastique. C'est en 1070 qu'un groupe de moines tombe littéralement amoureux d'une superbe vallée, dans la Belgique actuelle. Ils y travaillent la terre et font leurs prières selon les lois de Saint Benoît. Un jour, une princesse vient s'y rafraîchir après une partie de chasse, et perd son anneau dans une fontaine remplie d'eau claire.

Malgré la petite taille de la fontaine, il est impossible de retrouver la précieuse bague... L'histoire raconte que c'est une truite qui apporta alors d'elle-même le bijou à sa propriétaire. Cette dernière, subjuguée par le miracle, décida d'allouer des crédits immenses pour la construction d'une superbe abbaye dans cette vallée désormais nommée le Val d'Or. De pauvre, la communauté de moines deviendra immensément riche dans cette vallée, au fil des siècles : les cultures ne sont pas les seules richesses que l'on peut y trouver : la métallurgie y trouvera naissance, entre autres, avec notamment les ancêtres des hauts fourneaux actuels.

Mais la colère du peuple ne va pas tarder à gronder, avec l'occupation par les français, et l'approche de la Révolution. L'occasion sera belle de massacrer et de piller les richesses de cette abbaye, que l'on a crue digne de recevoir le roi Louis XVI peu avant sa décapitation publique.

Ce premier tome d'Orval ne laissera personne indifférent. D'une part, il sagit d'une oeuvre de Jean-Claude Servais, ce qui est toujours un évènement quand on connaît la finesse inimitable du trait de ce dessinateur. Orval ne fait pas exception à la règle au niveau de la qualité graphique : les couleurs sont magnifiques, les paysages et les personnages également : les costumes des différentes époques sont fidèles et ont du faire l'objet de nombreuses recherches dans les manuels d'Histoire notamment. Par ailleurs, le côté scénaristique n'est pas en reste...

Ainsi, les séquences alternent entre plusieurs époques, entrecoupées par des textes en voix-off. Le découpage obtenu donne un rythme soutenu à cette série qui se révèle intéressante à bien des points. Une BD qui nous en apprend beaucoup sur les modes de vie des moines, et sur une partie de notre histoire, pas seulement française. Une très belle oeuvre qui peut justement se savourer accompagnée d'une bière Orval (une des dernières trappistes), dont j'attends avec impatience le second tome.