Quand des tensions surviennent, dans le système de Pequod, avec des navires marchands néo-toscans, les autorités civiles et militaires du Quadrant de Talbot sont loin d'imaginer ce qui se dissimule derrière, mais n'en sont pas moins inquiètes.
A peine de retour à Manticore, avec tous les honneurs que l'on sait, Aivars Terekov est renvoyé vers le Talbot à la tête d'une escadre. Promu commodore, il propose à Hélène Zilwicki d'être son ordonnance.
Et l'arrivée de sa force à Lynx ne sera pas de trop pour permettre à l'amiral Blaine de franchir immédiatement le terminus à l'annonce de l'invasion massive du système-mère par quelques centaines de cuirassés havriens.
Ce volume fait enfin avancer un peu l'histoire, au-delà de la fin de L'ombre de Saganami et de Coûte que coûte. Certes, il ne s'y passe pas grand-chose, au moins pour les amateurs de combats spatiaux dignes de ce nom, qui seront ici frustrés au dernier degré, surtout par le suspens final. Mais on doit reconnaître que cette relative stagnation, après le "bruit et la fureur" des tomes précédemment parus, est, précisément, relative, et qu'elle est aussi imposée par l'ampleur de l'univers créé par David Weber. Car en fait il faut bien se rendre compte que pas moins de quatre romans se déroulent quasiment en même temps : Coûte que coûte, L'ombre de Saganami, L'ennemi dans l'ombre... et Torch of Freedom, auquel font référence les allusions au "secteur de Maya" et surtout à la bataille sanglante livrée par Roszak pour la défense de Torche, allusions sibyllines pour les lecteurs exclusivement français. Et après cet élargissement des perspectives assez vertigineux, il faut bien le dire, les différents fils vont se renouer dans le prochain roman... qui ne paraîtra jamais assez tôt pour l'impatience des fans ! Mais ceci est une autre histoire...
De plus en plus au fil des tomes, et de façon inéluctable, le personnage d'Honor Harrington, tout en restant très important, se fond un peu dans un paysage de plus en plus vaste et complexe, où son poids devient davantage politique que militaire. Ses fans de la première heure peuvent le déplorer, mais l'évolution de la saga est assez intéressante pour offrir des compensations.
Cela dit, et vertige ou pas, ce tome contient quand même, à mon avis, des longueurs et scènes inutiles, par exemple avec les Detweiler. Par ailleurs, j'avoue que j'aurais survécu à l'absence d'une troisième édition du retour avec les honneurs de Terekov !
Quoi qu'il en soit des (légers !) défauts de ce tome, imputables à l'auteur, il faut souligner l'effort de L'Atalante pour répondre à la demande des lecteurs fervents de David Weber, en attribuant à sa saga un second traducteur, Michel Pagel, par ailleurs écrivain talentueux. Je suis d'autant plus étonnée de le voir traduire "to resent" par "ressentir" au lieu de "éprouver du ressentiment pour". En revanche, il est très agréable qu'il y ait très peu d'incohérences d'un traducteur à l'autre (je n'en ai relevé que deux). Le plus gros reproche que je ferai à Pagel, c'est que dans la dernière discussion manticorienne, Havre Blanc repère la fureur de sa femme par son écart de langage. Or en français, elle ne jure pas ! Certes, le juron anglais est impossible à rendre exactement, mais il m'aurait paru souhaitable de mettre quelque chose ailleurs dans sa tirade ("j'en ai plus qu'assez" pourrait avoir été remplacé par "j'en ai plein le c***", par exemple) pour faire sursauter le lecteur autant que Havre Blanc.
Mais je pinaille, sur le mode "qui aime bien châtie bien" : ce tome était nécessaire, il était nécessaire de le publier et, comme les précédents, il est indispensable à tout vrai fan de la série.