La revue McSweeney's publie régulièrement des recueils de nouvelles destinées à faire peur. On entend par peur, la peur physique (les morts-vivants, les fantômes) mais aussi la peur psychologique (Hitler, la fin du monde annoncée...).
Ce recueil est un savant mélange des deux. Pour certaines toutefois, on peut se demander ce qu'elles font dans un recueil d'histoires effroyables "de science-fiction ou de fantastique".
On sent que les différents auteurs n'en sont pas à leur coup d'essai. Les écritures sont maitrisées, et quoique différentes, toujours très agréables à lire.
Les abeilles de Dan Chaon
Cette nouvelle ouvre le bal et met tout de suite le lecteur en condition. Gene a refait sa vie auprès de sa nouvelle femme et de leur fils. Depuis quelques temps ce dernier pousse des hurlements pendant son sommeil sans en être conscient. Gene ne comprend pas. Puis, des bribes de sa précédente vie lui reviennent à l'esprit et petit à petit, l'énigme se résoud. Violemment.
L'ambiance est sombre, l'atmosphère est électrique. Une nouvelle efficace.
Le général de Carol Emshwiller
Que fait cette nouvelle dans ce recueil ? Il n'y a rien d'effroyable dans cette histoire qui est, certes, agréable à lire, mais qui tombe un peu comme un cheveu sur la soupe.
Sinon, le chaos de Nick Hornby
Une histoire également efficace, directe, sombre. Je ne peux en dire plus car ne veux pas dévoiler l'intrigue. Même si le sujet n'est pas d'une originalité absolue, il est traité avec efficacité. Comme dans de nombreuses nouvelles, le lecteur est amené à imaginer autour du peu qu'on nous raconte, et c'est très agréable.
Le style est un peu particulier, raconté en langage parlé, pas désagréable à lire, mais il n'en faudrait pas plus long.
Derniers adieux de Harlan Ellison
C'est l'histoire d'un homme qui veut se surpasser, atteindre ses limites et, très influencé par différents courants psycho-socio-machin-chose, se retrouve devant un choix cornélien.
La chute de l'histoire surprend complètement le lecteur et est l'atout fort de cette nouvelle agréable à lire. La fin fait sourire, et même rire.
La danse des esprits de Sherman Alexie
Ou, "l'énième retour des morts-vivants".
Agréablement racontée, d'une écriture dynamique, mais sans grande originalité.
Le seau de Chuck de Chris Offutt
L'intrigue de fond est loin d'être originale (les mondes parallèles) mais la métaphore utilisée tout le long de la nouvelle (qui est également à l'origine du titre) lui donne tout son sel et son piquant.
Sympathique à lire.
L'affaire du canari nazi de Michael Moorcock
La nouvelle la plus longue du recueil, et hélas, la moins attirante. Le seul rapport avec le mot "effroyable" du titre du recueil est que, l'histoire se passant dans les années 30, en Allemagne, on y parle d'un Adolf Hitler, gentil comme tout, qui, c'est bien connu, ne ferait pas de mal à une mouche.
Pour le reste, j'ai été assaillie d'allusions à des hommes politiques de l'époque, à des événements réels, avec un meurtre d'une jeune fille. Tout cela est trop long, et manque de clarté.
Notes sous Albertine de Rick Moody
Longue nouvelle dont le sujet principal est une drogue, appelée Albertine. Le narrateur est journaliste et enquête sur cette nouvelle drogue apparue parmi les survivants de l'explosion d'une bombe à l'uranium. Le titre est explicite : on a vraiment l'impression que cette nouvelle a été écrite sous stupéfiant, car il est très difficile, voire impossible de suivre de bout en bout les différentes intrigues qui se mêlent joyeusement.
Soudainement, le lecteur va avoir l'impression d'avoir enfin tout compris, il se sent rassuré, content, puis non, ça repart dans d'autres directions, toutes plus confuses les unes que les autres.
Les pistes se brouillent et au final, on ne sait plus rien.
Pas facile à lire, cette nouvelle est tout de même très bien écrite, et bien construite, mais il ne faut pas louper un mot ou une phrase. C'est intense, long, dense, parfois embrouillé et confus. Au final, je ne saurai pas dire si j'ai aimé ou pas...
L'agent martien, roman d'aventures planétaires de Michael Chabon
Il s'agit ici du premier épisode de la nouvelle. La suite est annoncée dans la prochaine anthologie de McSweeney's.
Le second épisode expliquera peut-être le titre, car dans ce premier épisode, pas d'agent, pas de martien, pas d'aventures planétaires, mais des enfants, dont le père a été arrêté pour trahison, qui se retrouvent dans un orphelinat. Leur oncle vient les chercher et les emmène dans son dirigeable. Oui, parce que tout cela se passe en 1876...