Les Chroniques de l'Imaginaire

Les tours de Samarante (Les tours de Samarante - 1) - Merjagnan, Norbert

Cinabre est une préfigurée pas comme les autres : elle est douée d'empathie à un très haut niveau, elle est émancipée depuis son éveil, ce qui n'arrive jamais, et enfin elle participe régulièrement aux Salons de nuit, ce qui est à deux doigts de causer sa perte...

Triple-A est un ado rebelle, dont le rêve d'escalader la tour de l'Humanie, l'un des six Ordres qui régissent Samarante, le conduit à devenir une gorgone... ou, plus proprement, un argus, qui regarde par les yeux des caméras de surveillance. Et il est médusé par ces portraits qu'affiche la ville sur tous ses murs, d'une femme en danger. Herman Gryyem sera fasciné de découvrir qu'elle a le visage de Cinabre.

Oshagan Semuramat est le dernier survivant du massacre traître qui a balayé les siens. Aujourd'hui, enfin, après plus de dix ans passés parmi les nomades, il revient, terriblement armé, dans sa cité natale.

Ce premier roman, entre planet opera et post-apocalyptique, est remarquable. Certes, l'intrigue et les personnages ne sont pas d'une originalité confondante, et les influences (Banks, pour les IA, Herbert, pour le désert et la prescience...) sont perceptibles, mais il n'importe. Le style est puissant et personnel, exigeant pour le lecteur immergé d'emblée dans un torrent de vocables techniques et de concepts inconnus. En y repensant, d'ailleurs, c'est le même choc qu'avait été pour moi la lecture de L'oecumène d'or, de Wright.

Heureusement, le vocabulaire, quoique foisonnant et inventif, est aussi logique, souvent. J'en veux pour preuve l'usage de "doctes" pour les IA et "aliène" pour l'extérieur mal connu et dangereux des Cités, par exemple. Par ailleurs, l'auteur a joint en postface un glossaire qui permet de s'approprier davantage les concepts sur lesquels repose son univers, ce qui est vraiment une excellente idée.

D'autre part, ce torrent, dont je parlais plus haut, sait où il va, et n'a rien de gratuit : la fin, suspensive, laissait prévoir le second tome qui vient de sortir, certes, mais elle clôt aussi, nettement, l'histoire du retour d'Oshagan, entre autres.

Nul doute pour moi que je vais me jeter sur cette suite, et que je garderai en mémoire le nom de cet auteur français prometteur.

Les tours de Samarante a été primé par le Nouveau Grand Prix de la Science-Fiction française en 2008.