Ce volume voit regroupés Le cycle du non-A, et Le cycle des marchands d'armes. Il est préfacé par Jacques Goimard.
Le cycle du non-A est constitué par Le monde du non-A, Les joueurs du non-A (tous deux traduits remarquablement par Boris Vian) et La fin du non-A. Dans le premier opus, le lecteur fait la connaissance de Gilbert Gosseyn, dont les actions se déroulent sur fond de mensonges politiques et de guerre interstellaire, entre la Terre et Vénus, où s'est créée une utopie libertaire. Dans le deuxième, l'esprit de Gosseyn est transporté inopinément dans le corps du prince Ashargin, héritier légal du trône que Enro, empereur du Plus Grand Empire, a usurpé. En maîtrisant de mieux en mieux son cerveau second, il apprend notamment l'existence d'une grave menace dirigée sur la planète Vénus. Enfin, le troisième opus voit l'apparition d'un "autre" Gosseyn, en permanence relié au précédent par télépathie. On y retrouve les personnages précédemment rencontrés, et on y rencontre l'empire dzan, ainsi que leurs ennemis.
Ces romans peuvent être lus avec plaisir comme des aventures spatiales à la Vance, où le héros est sans cesse confronté à des environnements étranges, voire merveilleux, et à des êtres différents, qui ont quand même le bon sens élémentaire de parler anglais. Ces romans, ayant été écrits à une époque où il semble que la différence était moins établie entre science-fiction et fantasy, demandent une suspension d'incrédulité plus importante qu'il n'est de mise dans la SF qui s'écrit de nos jours : le lecteur n'aura aucune indication sur quelque fonctionnement technique que ce soit, quelque magique qu'il pût sembler, par exemple. Soit, et cela peut même participer de l'agrément de lire un livre d'aventures. Malheureusement, Van Vogt utilise aussi ses romans pour présenter à ses lecteurs la sémantique générale, ou non-aristotélisme (non-A, en abrégé), discipline développée par le comte Korzybski dans le domaine des neuro-sciences. Cela donne lieu à des développements longuets. Par ailleurs, tous les non-A étant invincibles et surhumains, cela tend à donner une mauvaise image, d'enthousiasme sectaire, de cette théorie par ailleurs sérieuse et intéressante.
Le cycle des marchands d'armes se compose de Les armureries d'Isher et de Les fabricants d'armes. L'idée de base qui le sous-tend est que chaque gouvernement au pouvoir, qu'il soit démocratique ou autocratique, doit être freiné par l'action d'un contre-pouvoir protégeant le peuple de l'autoritarisme de ses dirigeants. C'est le rôle joué ici par les Armuriers. A cette fin, ils proposent des armes invincibles, mais uniquement défensives, aux citoyens honnêtes. On voit dans tout le cycle combien l'impératrice Inelda supporte mal cette restriction à son autorité. Dans le premier opus, un journaliste, McAllister, voit apparaître une Armurerie dans le bourg où il habite, en 1973, ce qui permet aux Armuriers de comprendre l'arme que l'impératrice est en train d'utiliser contre eux. La Guilde des Armuriers le renvoie chez lui mais... ce n'est pas si simple. Le second opus, présentant un autre affrontement entre Inelda et les Armuriers, tourne autour de la personne de Robert Hedrock, personnage mystérieux et immortel apparu dans le roman précédent, et à propos duquel on en apprend un peu plus.
Là encore, comme roman d'aventures, ça peut bien se lire. Encore faut-il ne pas trop chercher les raisons de ce qui se passe... Pour ma part, j'avoue n'avoir pas compris comment et pourquoi une Armurerie avait pu apparaître en 1973 ?! Et bien sûr tout fonctionne "comme par magie".
Il m'est évidemment impossible de me mettre dans la situation où étaient les premiers lecteurs de ces romans, à l'époque où ils ont été écrits. Mais si Jacques Goimard, dans sa préface, a raison de souligner l'influence qu'a pu avoir Van Vogt sur ces auteurs majeurs que furent Dick, Frank Herbert, ou Farmer, cela n'aide pas à trouver à ces romans un intérêt autre qu'historique, aujourd'hui, pour qui a lu ces auteurs depuis longtemps, et quelques autres. A ce propos, d'ailleurs, si j'ai trouvé très intéressante ladite préface, j'aurais apprécié d'en connaître la date d'écriture, que je peux supposer déjà ancienne, surtout pour un genre à l'évolution aussi rapide que la science-fiction.
Pour tout curieux de la Science-Fiction de l'âge d'or, ou pour un adolescent qui aime les romans d'aventures, cet opus est sûrement passionnant.