Désiré Saint-Pierre est un policier intégré au groupe homicide 64 du poste de quartier 48 rattaché au Service de police de la communauté urbaine. Voilà pour lintitulé complet de sa fonction. Mais Désiré nest pas qu'un flic parmi tant d'autres : seul noir au milieu des blancs, ce qui constitue déjà un sacré handicap, il cumule avec une insensibilité aussi bien physique qu'émotionnelle suite à un terrible accident de voiture qui l'a laissé certes en vie mais défiguré. Depuis, il ne désire qu'une chose : se sentir vivant. Il est actuellement détaché sur laffaire de la Tueuse aux bagues, une femme insaisissable qui laisse derrière elle des cadavres. Taxée de serial killeuse par les médias, elle a plutôt tout d'une professionnelle selon les forces de police. En partant sur ses traces, Désiré va très vite entamer une descente vers l'enfer.
J'avoue avoir été totalement décontenancée par ce roman. Alors que je pensais lire un polar assez classique avec une enquête, des suspects, des pistes, j'ai plongé dans la psyché d'un homme insensible à tout. Désirée n'éprouve rien, ne ressent rien, ni douleur, ni plaisir, ni peine, ni joie, rien, le vide complet. Plus rien ne le touche, ni physiquement ni émotionnellement : c'est une coquille vide, un être de chair et de sang sans rien de plus. C'est extrêmement déroutant d'autant que le style de l'auteur rajoute à cet aspect détaché en accumulant les listes, les répétitions, les descriptions techniques, encyclopédiques, méthodiques. Bien que l'univers décrit soit violent, sanglant, désespéré, Désirée s'y promène et nous y promène avec un détachement extrême. L'enquête passe très rapidement en second plan, au point qu'on se demande même si elle avait une utilité, en dehors de permettre l'utilisation d'une image racoleuse en couverture mais qui ne correspond pas avec le contenu de l'ouvrage.
Rarement roman ne m'aura laissé aussi interloquée. Si le but de l'auteur était de nous entrainer dans le sillage de son personnage central et de nous faire ressentir la même absence de sensations, c'est réussi. Mais il pousse l'anesthésie trop loin et on finit par ne plus rien ressentir ni même le plaisir de la lecture. Il est aussi possible que je ne sois pas le lecteur idéal de ce style douvrage et que je sois passé à côté des intentions de lauteur puisqu'il a quand même reçu le Prix des lecteurs Quais du Polar/20 minutes 2010, signe que d'autres ont apprécié ce qui m'a laissé une impression étrange. Dans tous les cas, une chose est certaine, Anaisthêsia est un ouvrage qui ne laisse pas indifférent.