Au terme de Le Souffle d'Aoles, Pelmen et ses compagnons sont arrivés aux murs de Sinista, la ville sombre où sont emmenés tous les malheureux insatisfaits d'Ardalia. En dépit du bon sens, Pelmen a pénétré cette cité effrayante pour en tirer son meilleur ami Teleg et y est parvenu.
La petite communauté fuit alors les vapeurs malsaines du volcan qui embrument leur cerveau et les incitations tendancieuses des mages pourpres. Alors qu'ils viennent enfin de s'éloigner de la zone dangereuse, Teleg qui a constaté que Pelmen lui avait menti et que sa sur ne fait pas partie du voyage, choisit de retourner à la Cité d'Ambreroche. Désespéré, Pelmen se voit néanmoins contraint de l'abandonner à son sort pour fuir l'armée de guerriers dévolus à Valsshyk. Jusque là, l'entente avait régné entre les membres de ce groupe étrangement assorti. Quand l'armée les rejoint, Lominan qui n'est plus dans la meilleure des formes depuis qu'elle a vu un Malian de sa connaissance se faire torturer et être transformé en nylev par Sinistan est reprise par ses doutes et ses envies de fuite. Elisan-Finella est elle aussi plutôt d'avis de se faufiler hors du combat. Quant à Xuven, il préférerait combattre. Les Malians partent donc de leur côté, vers leur cité de Belenia, où elles constatent que l'Harmonie est également contaminée par le mal. Pelmen et son oncle quant à eux vont faire face à la plus insensible et la plus effrayante des phalanges. Ils s'en sortiront de justesse grâce à l'Algam mythique dont Pelmen est le Cavalier. Ce ne sera pourtant que pour rencontrer embûches et embuscades tout au long de leur périple.
Avec Eau Turquoise, Alan Spade donne une nouvelle ampleur à son cycle : de manigances politiques en errances militaires, les populations sont manipulées par le mal, et Hevelens comme Malians pourraient bien y laisser, si ce n'est leur corps, du moins leur âme. Magnifiquement amené, cet ouvrage est le digne successeur du précédent : une langue légère mais imagée qui fait la part belle aux expressions du cru, telle: "avoir la chair de galcyne", et une trame passionnante qui ne s'embarrasse pas de fioritures, tels sont les armes de l'auteur. Dès lors, avec ce roman si presque parfait, on peut être en droit de regretter le morcellement, indispensable certes mais modélisé dans un genre très "suspense à l'américaine", qui scinde l'intrigue en chapitres consacrés soit à un groupe, soit à un autre, et qui nuit à la continuité du rythme narratif.
Finalement, n'oublions pas de traiter du travail d'édition mis en place pour valorisé plus encore si possible le Cycle d'Ardalia dans son ensemble. Thibaut Desio, vainqueur du concours pour la couverture du Souffle d'Aoles, signe ici encore une première de couverture très réussie. Dans des teintes bleu pâle clin-dil au titre et avec des personnages en tous points semblables aux descriptions des héros du roman, cette illustration agrémente le texte d'un visuel unique pour en faire un objet-livre très esthétique, tout en ouvrant de nouveaux horizons à l'imaginaire du lecteur.