Ce roman est le premier tome d'une tétralogie très ambitieuse traitant d'une grande quantité de sujets, mais dont le thème principal (pour ce tome) peut se résumer ainsi : les différentes organisations criminelles du monde entier tentent de se regrouper pour devenir encore plus fortes. Différentes organisations policières, secrètes ou non, essaient de les en empêcher. L'action se passe principalement au Québec.
A partir de ce postulat de départ, c'est un patchwork impressionnant de thèmes qui se croisent et s'entrecroisent dans ce roman : les vols d'organes, les greffes d'organes, mais aussi le syndrome des personnalités multiples, le syndrome de Tourette, la fabrication des couteaux d'art, l'art contemporain organique, les techniques de zen, les organisations secrètes, les marchés bancaires... et bien d'autres encore. On sent bien que l'auteur a voulu faire partager toutes ses passions à ses lecteurs, et c'est très instructif (même si certains passages sont un peu trop scolaires).
Le lecteur est assailli de multiples informations, riches et denses, qui sont distillées dans de courts et innombrables paragraphes. C'est vif, dynamique, parfois un peu trop, on n'arrive plus à suivre les dizaines de personnages différents. Si on a le malheur de poser le livre deux jours (on part en week-end et on n'a pas le temps de lire, par exemple) quand on reprend la lecture, c'est très difficile de repérer qui est qui, qui fait quoi, qui fait partie des méchants ou des gentils. Le lecteur doit être constamment attentif, il n'est absolument pas possible de laisser son esprit vagabonder en lisant ce roman.
Paradoxalement, le rythme très soutenu n'empêche pas de se poser la question suivante : qu'est-ce qui se passe réellement ? Il y a quantités d'échanges de mails cryptés, codés, inviolables bien sûr, entre quantités de personnages et quantités de pays, des coups de fil tout aussi sécurisés, des rendez-vous secrets, des guets-apens, et bien sûr des meurtres... Mais j'ai eu parfois du mal à tout agencer pour bien suivre l'intrigue principale du roman. Les personnages sont flous, parfois froids, si nombreux qu'on peut avoir du mal à suivre. Mais certains sont sympathiques, intrigants, et on aimerait en savoir plus sur les Jones par exemple, des moines "zen" aux méthodes très particulières.
Certaines tournures de phrases, certaines expressions surprennent jusqu'à ce qu'on réalise que l'auteur étant québécois, il n'y a pas eu de traduction. Cela ajoute un petit côté sympathique à ce roman.
La lecture n'est cependant pas désagréable, loin de là ; on se demande constamment "où veut-il nous emmener ?". C'est cependant si dense, si riche, qu'il m'a paru plus sage de ne pas enchainer le tome 2 immédiatement. Il me fallait souffler un peu avant de me replonger avec plaisir dans les méandres tortueux de l'univers bien particulier de Pelletier.