Au début du Vè siècle, l'Empire romain s'effrite peu à peu, pendant que les Wisigoths, chassés par les Huns, se voient contraints d'errer jusqu'à trouver un territoire qu'ils pourraient appeler le leur. Ils le trouveront au sud-ouest de la Gaule, autour de Tolosa, l'actuelle ville de Toulouse. Un compromis est alors instauré entre les Romains et le roi des Wisigoths, Théodoric. Ce peuple peut régir ces terres en échange d'une aide militaire.
Le contexte ainsi posé, intéressons-nous à l'histoire de Wotila, ce jeune homme au passé mystérieux, et de sa tribu, menée par le reik Thorulf. Afin de prêter assistance au seigneur Galius et à son futur gendre Avitus, menacés par une bande de pillards, la tribu de Thorulf se met en route au nord de Tolosa, à travers les bois. Wotila est bien entendu du voyage, mais il est troublé. La veille, son ennemi, Retemer, a affirmé au su et au vu des compagnons de jeu de Wotila que Livtrasir et Frea, ses parents, n'étaient justement pas ses parents. Si ses amis n'en croient pas un mot, Wotila est sonné par cette révélation. Alors que lors d'une halte il s'enfonce dans les bois, une apparition prend forme devant lui, l'appelant Lucius. Le doute n'est plus. Mais à cause de ce secret, Wotila court un grand danger, y compris dans sa propre tribu.
Du côté des Romains, Galia, la fille de Galius, doit bientôt devenir l'épouse d'Avitus. Si son père est romain, sa mère était une gauloise, et Galia se sent très proche de cette culture. La confrontation entre ces deux mondes est largement explorée à travers le récit. Les Wisigoths n'ont pourtant rien d'une civilisation moins avancée que les romains : leur cité royale est élaborée, leurs mises soignées. Mais bien que convertis au christianisme leurs traditions païennes perdurent, une sorte de chamanisme aussi, ce qui n'est pas au goût de l'Eglise romaine, qui a dépêché le curé Sidonius dans le but d'évangéliser la contrée wisigoth.
La série se met ainsi en place tout doucement. Le cadre historique est parfaitement expliqué dans un prologue, un trombinoscope aide à bien cerner qui est qui, et à la fin de l'ouvrage un lexique permet d'en savoir plus sur les Wisigoths, la mythologie germanique et la Gaule de cette époque. On sait que l'histoire va tourner autour du passé de Wotila, mais guère plus. C'est assez plaisant en réalité, puisque cela laisse le temps aux auteurs de bien poser le contexte. Cécile Chicault s'est visiblement bien documentée pour dessiner les villes, les vêtements, les parures. De nombreuses vignettes fourmillent de détails et méritent qu'on s'y attarde plusieurs secondes. Ses planches sont d'ailleurs très agréables. Les traits sont nets, voire anguleux, mais les couleurs affirmées, avec de beaux effets de brume, de poussière, de vapeur, qui viennent contrebalancer cette rudesse et apportent une harmonie certaine à l'ensemble.
Rien de palpitant pour l'instant, mais les bases sont posées. Et le plus important est là, ce premier opus donne envie de savoir comment les choses vont se passer pour Wotila, que nous quittons en bien mauvaise posture...