Les Chroniques de l'Imaginaire

Les liens du sang (Le Cercle (Naifeh) - 1) - Black, Holly & Naifeh, Ted

Rue n'est pas du genre à s'en faire dans la vie. Ça ne sert souvent à rien et ce n'est pas très bon pour la santé. Du coup, elle ne s'en fait pas. Seulement, quand elle voit son père, Thaddeus, affalé dans le fauteuil, incapable de faire autre chose que de regarder la télévision, et ce depuis des semaines, elle a bien du mal à ne pas s'en faire. Il faut dire qu'il a des raisons. Sa femme, Nia, est partie trois semaines auparavant et n'est jamais revenue. C'est aussi très dur pour Rue, mais elle garde espoir. Et puis, elle a des amis, elle, sur qui elle peut compter. Des amis à qui elle ne raconte quand même pas tout.

Parce que depuis que sa mère est partie, Rue voit des choses. Partout, dans la rue, dans les bars, elle voit de drôles de personnages. Qui ne sont pas humains. Comme des fées. Qui pourrait la croire si elle le racontait ? Surtout qu'elle n'est pas sûre d'y croire elle-même étant donné que personne ne semble les voir. Quand son père se fait arrêter pour le meurtre d'une de ses étudiantes, Sarasa Narayan, c'en est trop pour Rue. Il faut que quelqu'un lui explique ce qu'il se passe.

Et c'est là qu'elle va faire la connaissance d'Aubrey, le père de sa mère. Son propre grand-père, qu'elle n'a jamais vu.

Je connais Holly Black de nom mais sans avoir lu Les Chroniques de Spiderwick. Avec Le Cercle, elle se met aux comics. Elle est aidée en cela par Ted Naifeh, dont j'avais par contre lu Polly et les pirates. Ici, on délaisse les personnages sans pieds et les mains avec des doigts crochus et qui n'en ont pas le bon nombre. Naifeh officie dans un registre beaucoup plus réaliste. C'est d'ailleurs intéressant de comparer deux univers graphiques d'une même personne. Parce que là où on aurait pu le croire limité dans son style et ses capacités dans Polly et les pirates, on le découvre très capable. Il alterne les cases avec plus ou moins de détails mais on se rend compte de son talent quand on voit ses gros plans sur les visages. Les émotions ressortent très bien des pages, sans qu'il ait besoin d'en faire des tonnes. C'est donc une très bonne surprise dans ce sens.

Pour ce qui est du reste, ce premier tome est une bonne introduction. Rue, ainsi que le lecteur, découvre le monde des fées. Mais pas de manière trop brutale. Surtout qu'elle n'a pas que ça en tête. Cela fait partie d'un tout, comme innocenter son père, retrouver sa mère et comprendre qui elle est. Parfois, certaines transitions sont un peu trop rapides, les choses ne sont pas amenées correctement. C'est peut-être le style de l'auteur. Et, même s'il faut s'y faire, cela ne dérange pas vraiment la compréhension qu'on peut avoir du récit. C'est perturbant, agaçant sans doute, mais pas rédhibitoire.

Finalement, ce premier tome en noir et blanc de Le Cercle est une lecture qui demande à être approfondie. La fin ouvre des portes à de nouvelles questions, on s'en doute. Et du coup il faut espérer que la suite ne se fera pas trop attendre. Nous sommes comme Rue, en attente de réponses.