Jean Van Meer est un folkloriste néerlandais francophone. Cela l'amène à être neutre dans le conflit qui secoue le monde lors de la première guerre mondiale. L'homme est également francophile, ce qui l'amène à être choisi par les plus hautes autorités militaires françaises pour une mission bien particulière : chercher l'ingénieur Hellequin, introuvable jusque là. L'ingénieur en question est l'auteur de nombre d'inventions de génie, mais depuis quelques temps, il a un peu perdu pied avec la réalité...
En effet, Hellequin est devenu un peu trop inventif, et n'importe quelle idée farfelue est l'occasion d'inventer de nouvelles armes ou machines... Qui ne fonctionnent jamais ! Comme le canon à rêves qui vise à empêcher les soldats allemands de rêver (et donc qui les rendra fou à terme), ou les plantes barbelés qui s'insinueraient jusqu'aux tranchées ennemies... Mais cela, les allemands l'ignorent, et ils sont toujours à la recherche de l'ingénieur fou.
Attention, la mission de Van Meer est bien de chercher Hellequin, mais en aucun cas de le trouver ! L'objectif est qu'il attire à lui le plus d'espions allemands possible, histoire que ceux-ci se retrouvent au maximum sur de fausses pistes... Et dans cette vieille ville de Butcherwood, où on retrouve toute la lie de toutes origines, il va falloir jouer serré avec les alliances des uns et des autres, en profitant notamment des rivalités entre le clan français et le clan des chinois... D'autant que Hellequin vient lui-même bien rapidement à Van Meer...
Et c'est bien là un des plus beaux intérêts de ce livre : l'homme recherché est retrouvé (alors qu'il ne le faut surtout pas, rappelons le...) dès le début. Alors, la mission de Van Meer prend une tournure rapidement inattendue. Un beau crochet scénaristique de la part de David B., qui sera notamment l'auteur des deux tomes de Par les chemins noirs (aux éditions Futuropolis). A noter que ce livre est une réédition qui paraît dans les fameux romans Aire Libre, d'un livre initialement paru en 2001. Il est d'ailleurs à noter que Par les chemins noirs en est un peu la suite, avec notamment la réapparition du personnage de Mina...
Ainsi, tout est une question d'alliances entre personnages et clans. Et les français ne font pas l'exception à la règle, avec des espions à la solde des allemands. Les chinois en prennent pour leur grade, tandis que les apparitions de l'ingénieur Hellequin ne sont jamais dépourvues d'intérêt : ses idées, bien que farfelues, ne sont pas pour autant dépourvues de logique scientifique, rendant le personnage particulièrement intéressant et rafraîchissant.
Au final, un très beau livre qui raconte à sa manière un peu allégorique les horreurs de la guerre, et qui n'est pas sans faire réfléchir. Reste juste à donner une explication sur son titre : La lecture des ruines... Cela vient d'une idée de Hellequin (toujours lui...), qui trouve que les bâtisses démolies par les bombes forment un alphabet de 72 lettres. Un alphabet permettant de communiquer avec l'esprit de la guerre, si tant est que l'on peut le déchiffrer...