Bahzell Bahnakson, fils du prince Bahnak régnant sur Hurgrum, a été envoyé à Navahk en tant qu'otage. Il se morfond dans cette ville infâme sous le joug de Churnazh et affronte avec une infinie patience moquerie en tout genre et mépris envers son appartenance à la race hradani.
Alors qu'il traverse un couloir sombre afin de rendre visite à son ami Brandark, il entend des cris. Il essaie raisonnablement de les ignorer car il sait qu'ils sont source d'ennuis certains. Son éducation cependant sera la plus forte puisque la nature des plaintes ne permet aucun doute : une demoiselle est en détresse et il ne peut, malgré tout, rester sourd à ses appels à l'aide. Comme il le soupçonnait depuis le départ, il vient de se mettre dans une panade qui n'aura de cesse de le poursuivre jusqu'à sa destruction.
Voici le premier tome d'une trilogie de fantasy dont l'auteur est David Weber, plus connu pour la série Honor Harrington. Il met en scène un personnage imposant de par sa taille et de par son espèce, Bahzell est un hradani, une race atteinte par la Rage autrement dit ce sont des Berserks. Lors d'une guerre mémorable, les hradanis ont été maudits et condamnés par les sorciers à subir cette abomination. Depuis ils sont craints par tous mais Bahzell a un rapport tout à fait particulier avec la Rage car il parvient à la contrôler.
Il se retrouve, à la suite d'un différent avec le prince de la Couronne Harnak, propulsé sur les routes en compagnie de son acolyte, Brandark, un apprenti barde qui se pique de musique et de poésie. D'ailleurs ce roman est également le récit d'une amitié virile jamais démentie et aucune histoire d'amour ne vient perturber ou égayer cette aventure car si les personnages féminins existent ils ne sont pas là pour embellir le tableau. Personne ne parvient à souffler la vedette au géant au grand cur doté d'un caractère un brin râleur et d'une opiniâtreté peu commune.
Bahzell est un personnage assez basique dans l'ensemble. Son caractère n'est pas difficile à cerner, de même que les valeurs qu'il défend. Son entêtement peut surprendre parfois, ses motivations sont cependant compréhensibles et facilement explicables. Il ne manque pas de psychologie, loin de là, sa ligne de conduite est seulement assez transparente et sans surprise.
Au final, ce qui caractérise le héros, qualifie l'ensemble du roman. On ne peut pas parler de livre « primaire » car ce serait dégradant mais il y a ce côté sommaire si l'on peut dire. Le vocabulaire, le style, l'histoire, la centralisation de l'intrigue et du récit sur Bahzell, en font quelque chose que l'on a perdu l'habitude de lire parce que la fantasy a semble t-il évolué. Ici on trouve un monde, une toile de fond politique, des luttes de pouvoir, un événement de départ qui va motiver la fuite du héros, un compagnon de route enfin les ingrédients minimum. Le fait demeure cependant que c'est Bahzell qui tient le haut du pavé, de par sa taille et de par son rôle. Le reste paraît peu approfondi, pas assez creusé comme si tout tournait tellement autour de Bahzell qu'il semble inutile de développer le reste plus avant que l'esquisse. C'est dommage mais peut-être en lien avec l'époque où le roman a été écrit, c'est-à-dire en 1995. Le genre a pris une autre dimension depuis lors. L'histoire marque peut-être le pas de ce point de vue avec son manichéisme prononcé dans la façon de présenter le combat du bien contre le mal. L'écriture est à la hauteur de cette remarque de même que le style. Le livre n'est pas mal écrit (ou mal traduit c'est selon), il est simplement sans fioritures, efficace et direct bien que l'emploi du mot « difficultueux » rencontré à plusieurs reprises reste, si l'on peut dire, en travers de la gorge du lecteur. Ce choix n'est pas très heureux et son effet sur le texte pas des plus harmonieux car il le tire immanquablement vers le bas. Ce roman néanmoins demeure agréable à lire parce qu'il baigne dans une atmosphère bon enfant. Il est essentiellement axé sur le suspens, les combats et les joutes oratoires entre Bahzell et Brandark.
Pour conclure, c'est un livre sympathique, pas un grand roman bien sûr, mais quelque chose d'une facture classique et attendue qui reste plaisant à découvrir.