Molière est mort. Etant un homme de théâtre durant le règne de Louis XIV, il n'a pas droit à un enterrement digne de ce nom. C'est sous son vrai nom, Jean-Baptiste Poquelin, et sous le métier de son père, qu'il est enterré sous les yeux de l'assemblée. Molière était malade, certes, mais Agnès, une des personnes qui assiste à son enterrement, est certaine que ce n'est pas de maladie que l'homme est mort...
Agnès ne tarde d'ailleurs pas à rencontrer Scapin, Alceste et Argan, d'autres illustres personnages présents aux funérailles... De leur propre créateur ! Car il s'agit bien là de personnages tout droit sortis des pièces de théâtre du maître... Les personnages en question sont là pour sauver la mémoire de Molière. En cela, les voilà aussitôt assistés de la fortune d'Harpagon, le célèbre avare lui aussi personnage de Molière...
Et c'est ainsi sept personnages de Molière qui sont bientôt réunis, lorsque Dom Juan revient des enfers grâce à un sort prononcé par Agnès, la dame au chat noir. Dom Juan a le don d'ubiquité : c'est ce qui lui permet de voir qu'un groupe d'hommes en noir souhaite les éliminer... Et pour cause ! La pièce Dom Juan n'a pas vraiment les faveurs de Louis XIV, et ce dernier cherche à éliminer toute trace de Molière et de son oeuvre ! Ce sont les propres personnages de Molière qui peuvent maintenant rendre immortelle la mémoire de leur créateur...
En cela, ils sont enfin rejoints par Tartuffe, un homme emprisonné, rendu maintenant libre... Chacun de ces personnages possède un élément, une clé qui va permettre à la mémoire et l'oeuvre de Molière de survivre...
Préserver l'oeuvre et la mémoire d'un homme de théâtre... Voilà ce que nous proposent de découvrir Fred Duval (scénariste de Gibier de potence, Hauteville House et d'autres séries du même éditeur) et Florent Calvez, le dessinateur de Les aventures extraordinaires de Nelson Lobster, avec un certain Corbeyran au scénario. Côté graphique, c'est beau et détaillé, avec un dessin mettant l'accent sur les visages et les expressions. Les effets de flashbacks sont également du plus bel effet, pour les scènes où on aperçoit le personnage de Molière. Du tout bon de ce côté donc !
Côté scénario, il faut faire face à un exercice difficile, en mettant en scène absolument sept personnages, et surtout en trouvant un vrai rôle à chacun. L'exercice est d'autant plus difficile que le tout doit être fait dans un one-shot ! Dans les huit tomes précédents, on trouve du bon et du moins bon. Eh bien, le tome qui nous intéresse ici se retrouve finalement dans la moyenne... Il faut également souligner que Sept survivants, le tome précédent, mettait la barre très haut dans cet exercice (il s'agissait là du meilleur de tous les Sept à mon sens). Ici, l'idée de mettre en scène les personnages les plus connus de Molière est très bonne, mais force est de constater que certains personnages restent franchement sous-exploités.
Ainsi, on trouvera un rôle certain à Tartuffe ou à l'excellent Harpagon, drôle de pingrerie au passage, alors que Alceste ou Scapin sont nettement moins utiles. Le one-shot qui en résulte reste de bonne facture toutefois, mais il ne restera pas dans les mémoires pour l'éternité, alors que cela restera le cas pour Molière...