Les Chroniques de l'Imaginaire

Daddy - Schultheiss, Matthias

Le monde a basculé dans le chaos, ce qui ne plait pas du tout à Dieu. Ainsi a-t-il demandé à son fils de se révéler aux hommes afin de les ramener vers lui. Mais Jésus a vu clair dans le jeu de son père, qui se frotte continuellement au Diable pour maintenir un certain désordre. Car sans catastrophes ni guerres, qui aurait encore besoin de Dieu ? Jésus a donc préféré vivre dans la clandestinité, au grand dam de son père qui pour se venger l'a frappé de cécité. Pour ne pas le laisser totalement à l'abandon, il l'a affublé d'un bouffon chargé de le guider. Ce bouffon au faciès d'Hitler guide Jésus à travers les villes mais essaye de le détourner du droit chemin pour l'attirer vers le mal.

Le Jésus dépeint par Matthias Schultheiss est loin, très loin, de l'image que s'en fait tout un chacun. Ce Jésus là est gras, sale, porte la barbe longue et les cheveux encore plus. Pire encore, c'est un drogué, qui dès qu'il le peut s'enfonce une aiguille dans le bras pour oublier que des enfants souffrent. Les enfants. Jésus n'a que ce mot en tête. Sauver les enfants, faire en sorte qu'ils ne souffrent plus. Ils incarnent l'innocence, ne méritent pas que le mal s'abatte sur eux, qui plus est avec la bénédiction du bon Dieu. En revanche il n'hésite pas à s'en prendre aux adultes et à massacrer les dealers par exemple, en volant au passage leurs réserves.

Le propos de Daddy semble vouloir dénoncer l'hypocrisie de l'Eglise, mais quelle étrange façon de s'y prendre ! Non seulement le propos est brouillon, mais que dire des dessins ! Ils sont extrêmement sombres, au point qu'il est nécessaire de coller son nez à la planche ou de jouer avec la lumière pour percevoir les détails. Les traits sont parfois très précis, mais souvent approximatifs. En bas des pages figurent à plusieurs reprises des dessins très simples, dignes d'enfants de dix ans, qui sont sans doute censés étayer le propos mais leur fonction reste opaque, je ne vois vraiment pas ce qu'ils viennent faire dans cette histoire.

En définitive Daddy est une bande dessinée qui partait d'une bonne idée, mais le résultat ne vaut absolument pas la peine qu'on s'y attarde.