Richard Price nous invite à suivre les tribulations d'une famille italienne dans le Bronx des années 70, les De Coco, et plus particulièrement à travers les yeux de Stony, le fils de dix-huit ans.
Stony rêve de travailler avec les enfants. Cela lui vient certainement du besoin de protéger son frère Albert, anorexique à force d'être maltraité par leur mère. Mais ce nest pas évident d'aller à l'encontre de la volonté de son père, Tommy, qui a pour seul souhait de faire de son fils un mécanicien, métier qui se transmet de génération en génération chez les De Coco. En travaillant au service pédiatrique d'un hôpital Stony est sûr de sa vocation. Mais il est partagé entre son devoir de fils et son envie de faire ce qu'il souhaite réellement, quitte à faire de la peine à Tommy. Il trouve heureusement du réconfort auprès de son oncle, de qui il s'est toujours senti très proche. Ils parlent de filles, partent en virée à deux, et peuvent toujours compter l'un sur l'autre.
Le milieu qui est dépeint est très dur. Malgré la bande-son de James Brown qui rythme le roman, c'est une atmosphère pesante qui s'abat sur le lecteur. Les conflits familiaux sont omniprésents, par la violence, le manque d'écoute, les mensonges. Le sexe et l'alcool sont évoqués en permanence, car Tommy et son frère passent leurs soirées dans les bars et trompent allègrement leurs femmes, en parlent même à Stony. Et Stony lui-même n'est pas un enfant de choeur, les filles sont le principal sujet de conversation qu'il partage avec son meilleur ami Butler. Ces adolescents grandissent avec une absence affligeante de repères, et pourtant, lorsqu'ils prennent la peine de parler sérieusement, ils font preuve de grande matûrité. Ils se posent les bonnes questions, ont conscience des enjeux de leurs choix et ont la volonté de donner à leur vie le sens que eux souhaitent. Mais entre la volonté et la famille, que choisir ?
Frères de sang est un roman réaliste, dur et violent, et qui remet les pieds sur terre. Loin de la vision idéaliste "quand on veut on peut", c'est une démonstration de la solidité du carcan familial et sociétal. Quand on veut on peut essayer, mais ça ne suffit pas toujours.