Il est prisonnier. Il ne sait pas de qui. Puis un jour vient le voir un homme qui l'appelle Zandie, de ce surnom d'enfance que presque tous ignorent. Qui est-il, ce visiteur cultivé qui semble tout savoir de tout et tous, et qui soutient que qui veut changer le monde doit commencer par se changer soi-même ? Et que veut-il ?
Depuis qu'il a échappé aux tortures de Hamza Belala, cinq ans auparavant, non sans y abandonner son ami Ned, Charlie O'Shea traque son tortionnaire. Sans grand succès, il faut bien le dire. Sa dernière tentative est même un échec retentissant, qui conduit l'Abbé, son supérieur, à l'éloigner du terrain, ce qu'il vit plutôt mal. De plus, Hamza Belala est exécuté de main de maître quelques semaines plus tard, juste avant de commettre un attentat. Et à cette occasion, l'Abbé dévoile l'existence d'un nouvel agent, qu'il nomme Ami, et qui va "s'occuper" pour eux des terroristes les plus notoires et les plus dangereux. Frustré de sa vengeance, Charlie va scruter de très près les actions d'Ami.
Ce roman alterne habilement les scènes d'action, avec l'impétueux Charlie, et les scènes immobiles pendant lesquelles on assiste aux conversations de Zandie et de son mystérieux visiteur. Il n'empêche que le rythme en est lent, et que le lien entre les deux trames d'histoire, et les deux protagonistes qui sont le centre de chacune, n'apparaît à l'évidence qu'une fois passée la moitié du roman, même si l'auteur, en fait, a habilement semé des indices dès le début, qui deviennent flagrants à la relecture. Lent, teinté de science-fiction, nourri de culture classique et écrit dans un français superbe, riche, précis, et à la correction grammaticale parfaite, ce n'est pas un thriller comme les autres.
Les personnages sont bien campés, jusque dans la relative indéfinition du falot et immature Zandie, même si j'ai personnellement trouvé Agaïev fort peu crédible dans son omniscience. L'histoire est originale à plus d'un titre, d'une part par la relation entre Zandie et son "ravisseur" et d'autre part par le moyen d'action de ce terroriste particulier, moyen qui justifie tant ce titre que le précédent (Noon Moon, qui signifie Lune de midi). Il faut ajouter que tant les modalités que les conséquences de cette attaque sont parfaitement vraisemblables.
Du fait de ses particularités, cette histoire pourra plaire à ceux qui ne raffolent pas forcément du genre, mais qui apprécient une bonne histoire de politique-fiction, si elle risque d'agacer ceux qui s'attendraient à un thriller plus habituel dans sa forme. Il peut donc ne pas plaire, mais il s'agit néanmoins d'un roman de bonne qualité, qui fait passer un agréable moment de lecture.