Les Chroniques de l'Imaginaire

Le cul des anges - Legrand, Benjamin

Après plusieurs années d'activités plus que rentables, un réseau diffusant des snuff-movies pédophiles est sur le point de disparaître. Non pas qu'il ait été repéré par les flics, mais tout simplement parce que l'un de ses dirigeants, Henri-Pierre Barn, aimerait bien partir avec le magot. Pour son collègue américain, l'officier de marine Edward Valentine, cela ne pose aucun problème : libéré du chantage qu'exerce sur lui son partenaire, il pourra également en profiter pour disparaître. Mais le dernier membre du trio, le scénariste communément connu comme le Flamand, n'apprécie guère de se faire ainsi doubler par ses associés, qui ont négligé de le mettre dans la confidence : il lance un contrat sur la tête d'Henri-Pierre.

Bien évidemment, rien ne va se passer comme prévu. De nouveaux acteurs vont rejoindre la scène : la petite voleuse que le tueur à gages rencontre à la gare, la copine d'Henri-Pierre (pas si désintéressée que celui-ci le pensait), le chauffeur de Valentine (pas trop d'accord pour être sacrifié dans la mise en scène de son supérieur)... mais aussi des figures qui à priori n'ont rien à faire là : deux petits vieux partenaires de pétanque, ainsi que les divers membres d'un groupe musical nommé "le cul des anges" et leur manager véreux... Mais - hasard ou coïncidence ? - tout ce petit monde entretient en fait des relations plus étroites qu'il n'y parait : les uns sont voisins, les autres parents, d'autres encore amoureux, bref tout ça est plus emmêlé qu'un plat de spaghetti.

Benjamin Legrand ne perd jamais le lecteur cependant, tant il prend son temps pour présenter ses personnages, à travers de premiers chapitres amusants et légers qui nous font rentrer dans leur intimité. Ils sont beaucoup, mais ils sont attachants aussi. Peut-être trop d'ailleurs, vu que même les "méchants" ont leurs bons côtés (ils sont plus souvent ridicules que dégoûtants) : ceci fait perdre en crédibilité, celle-ci ayant déjà été bien entamée par les trop nombreuses coïncidences.
J'ai particulièrement apprécié le personnage de Fernand, ancien du Milieu, retraité mais ayant conservé des relations, qui a bien les pieds sur terre et un langage qui fleure bon l'air du Sud (à l'image de cette histoire qui se déroule entièrement sur fond de Baie des Anges) : quel plaisir de retrouver au fil des discussions des expressions locales comme "il est bien ensuqué" ou "ils sont Fanny" !

L'action est présente dès le début, simplement elle gagne en intensité au fil des événements, au point qu'on ne souhaite plus lâcher le roman avant la fin.
Au final, j'ai passé un très bon moment avec ce roman moins sérieux que son sujet ne le laissait supposer, et qui allie action, humour, personnages intéressants et même un brin de romantisme (trois couples qui se créent, tout de même !), le tout dans un style léger mais travaillé.