Le jeune Eon s'entraîne sans relâche depuis quatre ans, se préparant au moment où le Dragon Rat va choisir un nouvel apprenti. Chaque nouvelle année voit en effet l'Ascendance d'un des douze Dragons qui protègent le pays : l'Oeil du Dragon en titre, épuisé par des années d'efforts, prend sa retraite, remplacé par son apprenti ; et un garçon de douze ans devient apprenti.
Pour Eon, esclave estropié, c'est le seul espoir de recouvrer la liberté. Pour son maître, l'occasion de retrouver sa puissance et sa richesse perdues. Tous les deux cachent un lourd secret : Eon n'est pas un garçon de douze ans, mais une fille de seize ! La magie des dragons étant interdite aux femmes, les risquent sont énormes s'ils sont découverts...
Quel plaisir de faire la connaissance de dragons qui diffèrent du schéma occidental classique ! Les dragons du monde d'Eon/Eona ne sont en effet pas des cracheurs de feu qui emportent leur cavalier dans les cieux, mais des créatures énergétiques, visibles seulement pour une poignée d'élus faisant preuve de concentration. Un long corps sinueux, des cornes : leur physique est celui de dragons asiatiques, ce qui est tout à fait approprié puisque l'auteure a choisi de donner à son monde imaginaire une ambiance de Chine impériale plutôt bien réussie.
On s'en doute, Eon va parvenir à ses fins, et par là même s'embourber dans une situation fort périlleuse : l'empereur la désigne comme élue pour protéger son héritier face aux complots de son sinistre frère, qui convoite le trône avec l'assistance d'un Oeil du Dragon ambitieux... La jeune fille, déjà troublée par son nouvel environnement (passer du statut d'esclave à celui de seigneur n'est pas si évident !), devient un enjeu politique et ne sait plus à qui faire confiance.
Eona, malgré toute sa bonne volonté, commet erreurs sur erreurs : elle perd peu à peu le lien instable avec son dragon, et ses efforts pour être Eon en oubliant Eona n'arrangent pas les choses. Elle n'en est pas moins attachante, de même que les amis qui l'entourent. On apprécie particulièrement l'ironie du trio qu'elle forme avec son chaperon et son garde du corps : Eona est une fille qui se fait passer pour un garçon eunuque, dame Dela une femme dans un corps d'homme (un "Contraire", fort mal vu à la cour impériale...) et Ryko un vrai eunuque, les deux derniers ayant un faible l'un pour l'autre... Une véritable ode à la tolérance !
Quelques facilités et retournements trop prévisibles trahissent le roman destiné à un public adolescent, bien qu'il puisse plaire à un adulte. Je regrette également que rien dans la couverture du livre ne trahisse le fait qu'il s'agit d'une duologie : le roman finit en pleine action, frustrant le lecteur qui ne s'y attendait pas. J'ai cependant passé un excellent moment et j'ai hâte de découvrir la suite des aventures d'Eona.
