Djemila a choisi sa vie. Jusque son prénom, emprunté à une ville abandonnée dans le constantinois, son Algérie natale. L'histoire de son passé, Djemila ne la connait pas et choisi donc de l'occulter. C'est son choix aussi de voler à l'étalage, comme ça, pour le plaisir, pour le jeu... Mais là, elle a perdu. Et un simple lancer de dé va se transformer en véritable bombe à retardement. C'est toute sa vie, tout son passé qui risquent de lui péter à la gueule, et cette fois il n'est pas sûr que Sinclair puisse y faire quelque chose, tout homme public et grand philosophe soit-il...
Djemila est un paradoxe. Des personnages forts, trop forts, des liens alambiqués entre chacun d'entre eux, des histoires de trahison et de fidélité, d'amour à sa façon aussi... bref, tous les éléments traditionnels... Et pourtant Djemila a un peu le goût du "too much". Tout est un peu trop poussé, un peu trop caricatural. Une jeune femme, traductrice de son état, transperse avec un couteau la main d'un vigile de supermarché, se sauve sans être aucunement inquiétée pour être plus tard agressée au domicile de son pygmalion. Ca sent un peu trop la propagande. Mais la propagande propre pour autant. Celle où il n'y a pas de gentil tout blanc. Celle où le loup est juste d'un gris plus foncé que l'agneau, mais bon, hein, quand même... C'est bien lui le loup ! La très belle écriture de Jean-François Vilar aurait probablement été servie par plus de subtilité.
Mais une fois passé ce constat, qui n'en reste pas moins qu'une appréciation subjective jouant sur le gout du romancé, on passe un très bon moment de lecture. L'histoire est fluide. Les héros s'enfoncent tellement loin dans le noir qu'ils ne remontent pas vraiment, pas du tout pour certains. Sauf peut être Djemila qui, en quelques lignes de fin, redevient elle même.
Les flash-back en cours de récit sont concis, toujours très à propos, et donnent beaucoup de rythme à la narration.
Sans que l'on sache réellement comment l'histoire va se terminer, à la fin de notre lecture, on se rend compte qu'elle ne pouvait en fait pas s'achever autrement. N'oublions tout de même pas que le héros est sombre et qu'en bon héros qui se respecte, il se devait d'être irréprochable.
Un agréable moment, qui m'a certes demandé un peu de détachement, mais qui reste une lecture policière assez convaincante.