Ferrailleur de génie à la base, Joseph Joanovici, un petit juif aujourd'hui officiellement russe, réussit à survivre grâce à son intelligence et à ses aptitudes à passer tout en rondeur avec les plus hautes autorités allemandes. Sa famille est également en sécurité, même si les relations avec sa femme, Eva, ne sont pas vraiment au beau fixe. Aujourd'hui, avec Lucie, sa secrétaire, Joseph compte les billets dans une de ses cachettes parisiennes. Plus de seize millions en petites coupures, une véritable fortune que Joseph doit transformer en lingots d'or...
Mais là où n'importe qui serait heureux, Joseph est inquiet. Il sent bien que le vent tourne, que les allemands vont perdre la guerre, et que les gens oppressés vont chercher à se venger des profiteurs, une fois le conflit terminé. Alors, Joseph a une idée. Au lieu de laisser cet argent dormir et les rats dévorer les billets, il va investir. Dans la Résistance... Son premier acte consiste à faire libérer deux résistants de "Honneur et Police", un groupe d'activistes important de la capitale.
Mais pour gagner la confiance d'un groupe, ce n'est pas simple. Il va falloir commencer par faire libérer trente cinq personnes apparaissant sur une liste. Pas un souci majeur lorsqu'on a les connaissances de Joanovici, mais cela va se corser lorsque la liste d'après comprend plus d'une soixantaine de noms... D'autant qu'Otto a été évincé et que son remplaçant est beaucoup plus frileux dès que ses actions risquent d'alerter sa hiérarchie...
Ce troisième tome n'est pas sans rappeler La liste de Schindler, le célèbre film où il était également question des trafics d'un ferrailleur, mais allemand. Ici, Joanovici est juif, et il est également analphabète, se contentant de signer avec des croix et de compter en dessinant des semelles de chaussures... La comptabilité n'a par ailleurs aucun secret pour lui, même s'il a une façon toute particulière de la pratiquer...
Encore une fois, c'est ce genre de détails qui fait que le personnage de Joseph est si attachant. L'homme est on-ne-peut-plus travaillé et fouillé par Fabien Nury, au moins autant qu'un personnage principal de roman. Ses relations avec Eva, sa vraie femme, sont également étranges : on ne sait pas encore pourquoi Eva se refuse à lui lors de ses rares visites, et on peut se demander quelle est la part de responsabilité de Lucie (qui n'est pas juive) dans tout cela...
Côté dessins, Vallée conserve cette faculté de rendre chacun de ses personnages charismatique et facilement reconnaissable. Le dessin est beau, détaillé, avec une mise en couleurs efficace, qui ne nuit nullement à la lisibilité. L'accent est mis sur les expressions et, en cela, certains jeux de lumières sont de très belle facture.
Une série gigantesque, avec un univers qui mêle l'imagination des auteurs et la vraie Histoire, et il reste facile de démêler le vrai du faux dans cette histoire. Une série à côté de laquelle il est interdit de passer...