L'éditorial, comme la couverture appropriée de Bernard Duchesne, rappelle que la revue fête avec ce numéro ses dix ans d'existence. Afin de célébrer dignement cet anniversaire, ce numéro comporte dix textes de fiction.
Le dernier cri, de Sébastien Aubry : toujours dur de se faire remarquer quand on est un artiste débutant... Cette illustration du kitsch trash ne m'a pas vraiment surprise, mais son thème est certainement original.
L'enterrement de mémère, de Frédéric Desjardins : pour ne pas séparer ces Philémon et Baucis que furent mémère et pépère, il faut bien ré-enterrer mémère ! Une histoire savoureuse et désopilante, entre Romeo et Juliette et jugement de Salomon, sans doute l'une de mes préférées.
Pénitence, de Richard Tremblay : un homme qui a été la victime de sévices sexuels dans son enfance va retrouver son persécuteur. Une nouvelle entre glace et volcan, fort bien écrite.
Décompression en rouge profond, de Frédéric Durand : un vendredi soir typique pour deux losers. Presque typique... Une nouvelle intéressante, sur un plan sociologique.
Le lac du Fou, d'Ariane Gélinas : Andréa aime son oncle Derrick, croyant sans réserve ce qu'il lui a dit, à savoir qu'ils sont des âmes soeurs. Cette histoire pudique et touchante effleure tout en délicatesse un sujet tabou, sans être moins glaçante pour autant.
Aidant naturel, de Daniel Naud : le narrateur, paralysé et incapable de parler, a heureusement Raymond pour s'occuper de lui. Mais que faire quand Raymond ne vient pas ? Le thème de cette nouvelle est peu exploité, mais elle m'a paru bien trop longue. Dommage !
Chasse ouverte, de Maxime Houde : dans l'Allemagne d'après-guerre, un jeune soldat prend très à coeur sa tâche de chasseur de nazis. La nouvelle rappelle sans doute très opportunément aux plus jeunes générations que la "realpolitik" avait beaucoup de droits à une époque où le communisme était le pire ennemi.
Natalya, de Jean-Jacques Pelletier : Avec son personnage original de tueuse à gages, cette nouvelle est l'une de mes préférées.
Cette démoniaque quête de pureté, de Simon Roy, revient sur le roman Anges, de Julie Grelley, et sur la (possible) genèse des assassins d'enfant à travers le parcours particulier de l'un d'entre eux.
J'ai trouvé la rubrique Dans la mire particulièrement passionnante. Non seulement me suis-je trouvée en accord avec Norbert Spehner à propos de Carofiglio ou Vargas, mais en outre je souscris totalement à ce qu'écrit Simon Roy à propos de Beyrouth sur Loire, oeuvre apparemment moyenne hélas bourrée de fautes, dont le cas est malheureusement loin d'être unique dans le panorama de l'édition française : "Pourquoi le lecteur, si fortement sollicité par une offre littéraire considérable saison après saison, prendrait-il au sérieux une oeuvre bâclée quand l'éditeur même du désastre ne traite pas avec le minimum de rigueur requis son principal matériau, la langue ?".
Quant à son équivalent électronique, Encore dans la mire, il me donne très envie de lire le dernier Martin Cruz Smith, par exemple. Et à propos de la partie exclusivement virtuelle de la revue, ne manquez pas d'aller y découvrir Camera oscura, surtout si vous êtes cinéphile.