Nous sommes dans un univers éclaté par ce qu'on appelle le segmentisme : il s'agit d'un principe qui régit l'existence de chaque être humain dès l'âge de sept ans. Ce sont des êtres désormais immortels, au nombre de sept, qui ont mis sur pied ce principe. Les hommes et femmes de ce futur lointain se retrouvent partagés dans sept secteurs différents de la galaxie : travail, ordre, créativité, spiritualité, jouissance, échange et guerre sont ainsi faits. Depuis l'apparition du segmentisme, plus aucune catastrophe n'est à déplorer, puisque chacun se retrouve parqué avec les individus ayant les mêmes penchants naturels...
Aujourd'hui, c'est à Loth de passer les épreuves. Ses parents espèrent qu'il fera sa vie auprès d'eux, dans le secteur de l'ordre et de la spiritualité, mais ils se doutent bien que leur enfant, grand boulimique de films, a un esprit trop créatif pour rester dans ce secteur. Mais Loth est trop impétueux devant les examinateurs, qui décident de lui donner une bonne leçon, en décidant de l'envoyer dans le secteur de la guerre dès qu'il aura vingt-et-un ans. L'enfer de la galaxie, évidemment...
Et les choses n'iront vraiment pas en s'améliorant. Le jour de ses vingt-et-un ans, Loth arrive en retard pour décoller vers son secteur attitré bien des années auparavant. La justice est sans appel dans ce monde : Loth est condamné à recevoir une injection qui le vieillira de quarante ans ! Les prisons n'existent plus, et la justice est extrêmement expéditive depuis que les procès sont tous publics, et qu'il coûte une fortune d'assister en direct aux délibérations...
Mais Loth rencontrera une magnifique fille qui refuse de faire ce qu'on lui demande dans le secteur des plaisirs. Jezréel Seth aidera Loth à s'échapper de cette folie. Une seule destination est possible désormais : les deux fuyards vont rejoindre le frère de Jezréel, qui fait partie d'un groupe d'hommes qui vivent en marge de ces lois...
La première chose qui frappe en lisant ce premier tome de Segments, outre la richesse de l'univers, c'est le scénario de Richard Malka, qui n'a pas grand chose à envier à certaines séries de Jodorowsky, comme La caste de Méta-Barons, ou encore Megalex. Nous sommes dans un futur lointain, qui s'est sans doute forgé sur les vestiges de notre civilisation actuelle, et les auteurs mettent l'accent sur ce que pourrait donner une telle tournure, si on décidait de séparer les gens selon les sept grands principes énumérés ici.
Le scénario est donc travaillé, avec un univers tout à fait crédible et intéressant, dont de bonnes bases sont jetées au travers de ce premier tome. Côté dessins, on retrouve le travail détaillé et fouillé de Gimenez, qu'on avait déjà pu voir d'ailleurs aux côtés de Jodorowsky (La caste des Méta-Barons...), ou plus récemment dans Moi, Dragon... L'homme est donc habitué à dessiner ce genre d'univers, et cela se ressent une nouvelle fois au fil des cases.
Un premier tome tout à fait réussi, qui lance une série qui s'annonce prometteuse (meilleure que les récents Ogregod ou Showman Killer de Jodorowsky par exemple) : à suivre de près dès le prochain tome !