Une jolie petite fille blonde d'une dizaine d'années est retrouvée noyée dans un canal. Comme elle portait des bijoux dissimulés sur elle, et que ses paumes sont écorchées, la police en déduit qu'en s'enfuyant après un cambriolage elle a glissé et est tombée. Mais aucun cambriolage n'a été signalé dans le secteur. Toutefois, les propriétaires des bijoux sont rapidement identifiés. Quand Brunetti va les voir, l'épouse semble s'étonner de bonne foi de sa visite, déclare ne pas s'être aperçue de la disparition des objets précieux, et informe le commissaire qu'elle était ce soir-là à l'opéra, avec son fils aîné, son mari étant en Russie pour un voyage d'affaires. Mais ce qui étonne le plus Brunetti, c'est que les parents de la petite morte, des Roms, ne viennent pas réclamer le corps de leur fille.
Après les vucomprà africains de De sang et d'ébène, Donna Leon remet les extracomunitari au centre de son intrigue, en l'occurrence les Roms. Elle en profite pour montrer sans complaisance leur quotidien aux franges de la société italienne : vie souvent délinquante, manque de soins médicaux, mauvaise connaissance de la langue, non-respect des droits élémentaires des enfants et des femmes. Sans complaisance, du fait que si elle ne les rend pas spécialement sympathiques, elle n'en montre pas moins, avec la même objectivité, le racisme ordinaire auquel ils sont en butte.
L'intrigue policière en elle-même n'est pas très intéressante, et il est même douteux qu'il y ait eu un crime, mais, comme dans la plupart des autres romans de l'auteure mettant en scène Venise et le commissaire Brunetti, c'est l'atmosphère qui en fait tout le charme. L'atmosphère, mais également l'art subtil avec lequel l'auteure décrit ses personnages et les relations entre eux. En somme, une nouvelle aventure à suivre du détective plus vénitien que nature de l'auteure américaine.