Les Chroniques de l'Imaginaire

Les mystères de la forêt - Radcliffe, Ann

Publié pour la première fois en 1791, Les mystères de la forêt s'inscrit dans la tradition, encore récente à l'époque, du roman gothique. Ann Radcliffe y narre l'histoire d'Adeline, une jeune fille de dix-huit ans abandonnée à un triste sort. Après qu'elle a refusé de porter le voile, son père la retire du couvent dans lequel elle vivait depuis des années pour la confier à un étranger. Ce dernier, Pierre de La Motte, est en fuite, car ses créanciers le recherchent à Paris. Il n'avait pas du tout prévu de devoir s'occuper d'une jeune fille, qui plus est sous la menace, mais lui et sa femme la prennent dans leur voiture et se mettent en route pour s'éloigner de la capitale. Jusqu'au moment où un incident les contraint à s'arrêter près d'une abbaye en ruine et à y prendre logis, au beau milieu de la forêt.

L'atmosphère inquiétante prend toute son ampleur à partir du séjour imposé dans l'abbaye. Elle avait commencé dès les premières pages, lorsque de La Motte s'est vu confier Adeline dans des circonstances étranges. Mais avec les ruines de l'abbaye, les lumières feutrées de la forêt, les bruits, tout concourt à une ambiance typiquement gothique. L'environnement est angoissant, et les évènements qui vont se produire ne le sont pas moins. Adeline va être confrontée aux assauts d'un prétendant orgueilleux et dangereux, et l'amour viendra frapper à sa porte mais non sans maux.

Les mystères de la forêt est un véritable roman d'aventures, en plus d'un roman gothique. La mode du naturalisme est très présente, avec cette idée de décrire la beauté des paysages et les vertus de la nature, mais ces passages descriptifs ne sont que des connecteurs entre deux aventures. Car à l'instar d'un roman de cape et d'épée, le récit est très rythmé, il se passe toujours quelque chose, et les rebondissements sont nombreux. C'est simple, on ne s'ennuie pas une seconde en suivant les péripéties de l'attachante Adeline, tantôt confiante, tantôt trahie. Sa peur est contagieuse, on craint ce qui va lui arriver, on entend avec elle des voix étranges, car Ann Radcliffe maîtrise le suspense à la perfection. Le récit dans sa globalité nous entraîne sur des fausses pistes, nous sommes manipulés de bout en bout, jamais au bout de nos surprises ! Le texte est de plus parfaitement accessible, avec une traduction d'époque revue par Pierre Arnaud, dont la préface est très instructive et éclairante. Il vaut mieux toutefois ne pas la lire en entier avant de commencer le roman sous peine de trop en savoir sur l'intrigue. Un classique que je vous invite fortement à découvrir !