Un homme arrive dans une ferme. Il s'avance, ne trouve personne dans un premier temps, jusqu'à ce qu'on l'appelle. Il se prénomme Léo, et réagit de façon étrange avec son interlocuteur. Ce dernier doit apparemment tout à son visiteur du jour, qui est un écrivain. Léo possède ainsi de nombreux souvenirs, de nombreuses histoires, et il semble parler au fermier comme si ce dernier n'était autre qu'un personnage peu important. Comme un personnage secondaire dans une histoire, en quelque sorte...
Léo ne va pas rester longtemps à cet endroit, et va finir par rentrer chez lui, afin de poursuivre l'écriture de son nouveau roman. La maison est grande et vide, si ce n'est la présence d'une femme, Alice, qui n'est autre que la propre soeur de Léo. Dans la bourgade qui semble assez réduite, on trouve d'autres personnages, qui semblent inquiets, et qui ont surtout la mémoire qui est très courte ! Ainsi, l'un des personnages vient d'avoir une proche au téléphone, puis celle-ci a purement et simplement disparu, laissant Denis hagard...
La vérité, c'est que le Léo que tous connaissent ici est le personnage principal d'une fiction, imaginé par le vrai Léo, qui est atteint d'un cancer. Au fur et à mesure de l'avancée de la maladie, Léo perd ses souvenirs. Alors, les personnages et les lieux qu'il a imaginés disparaissent peu à peu, de manière inexorable, en commençant par les personnages secondaires... Alors, ces derniers voient une solution de secours pour résister le plus longtemps possible : ils emménagent tous chez le Léo et l'Alice de leur histoire... La proximité avec les personnages principaux devrait contribuer à ce que le vrai Léo se rappelle d'eux un peu plus longtemps, tout en espérant qu'une rémission chasse la maladie...
Ce one-shot signé Clarke (Mélusine) dans la collection Signé du Lombard a une propriété largement mise en avant : l'originalité ! Cette histoire est unique, forcément travaillée, et ne pouvait sortir que dans une collection comme celle-ci. On est ici bien loin des aventures de Mélusine, et on se retrouve devant un récit beaucoup plus intimiste, qui prend le temps de jeter les bases d'un univers pour le moins déroutant.
Ainsi, les maisons perdent une partie de leurs pièces, les routes se mettent à disparaître d'une heure à l'autre. Les personnages disparaissent tour à tour, et ce jusqu'à leurs propres souvenirs qui disparaissent. Certains d'entre eux s'en prennent d'ailleurs au Léo de leur propre histoire, mais finalement ce dernier étant lui-même un personnage inventé, il ne peut pas faire grand chose pour reculer le moment final où la maladie du vrai Léo l'emportera...
Graphiquement, le livre garde un dessin épuré, fait pour privilégier la lisibilité. Les couleurs restent simples, et les expressions des personnages, aussi secondaires qu'ils soient, sont largement mises en avant ici. Le récit avance à un rythme plutôt lent, sans doute volontairement, pour une conclusion tout à fait réussie, même si elle restera inattend
e. En bref, un livre surprenant de la part d'un auteur qui ne nous avait pas du tout habitué à ce genre de production : à lire pour se faire une opinion personnelle, en tout cas !