Les Chroniques de l'Imaginaire

Delirius 2 (Lone Sloane) - Lob, Jacques & Legrand, Benjamin & Druillet, Philippe

Lone Sloane, l'homme aux yeux rouges, va parcourir Delirius de long en large pour retrouver la fille de son ami Yearl, Mali. Delirius est une planète où le plaisir et le vice vivent en parfait accord. Délirante dans sa démesure elle n'en est pas moins écrasante pour qui ne la connait pas. Mais Lone Sloane ne va pas avoir les choses facilitées. Son ennemi, Shaan, l'Imperator, ne compte pas lui laisser une minute de répit. Pas plus que les fous de la Rédemption Rouge.

Avez-vous déjà essayé de résumer un trip sous acide ? Je ne saurai répondre de manière catégorique à cette question, mais il me semble que cela est impossible. Résumer un album de Philippe Druillet, dans l'univers de Lone Sloane, c'est un peu la même chose. Il faut vivre l'expérience.
Ce deuxième tome de Delirius aura eu bien du mal à sortir. Il faut quand même imaginer que le premier est sorti en 1973. Non, je ne me suis pas trompé, je parle bien de 1973. J'étais presque sur le point de voir le jour, mais pas encore. Je ne vais pas revenir sur les péripéties de la parution de cet album, qui sont résumés de manière totalement anarchique (étonnant, non ?) par Druillet en personne. En tous cas, le tome est là. Il y a donc des pages qui ont été dessinée il y a des décennies, d'autres nouvelles, des bonnes, des moins bonnes. Druillet assume. Les pages de merde, il les a gardées aussi. Cela fait partie de l'histoire du tome, pas de raison qu'elles soient amputées (bon, c'est un point de vue qui peut se discuter…). En tous cas, cela donne une œuvre sincère, puissante, complètement en décalage avec notre époque et les sorties contemporaines. Parce que, oui, Druillet a gardé son style, celui qu'il avait pour les autres sorties de Lone Sloane. Un style qui écrase sous le poids de la géométrie quand il s'agit de structures (vaisseaux, bâtiments), qui est totalement déstructuré dans sa maîtrise des formes quand il s'agit d'armures et de leur contenu (il n'y a qu'à voir la couverture) mais qui semble presque esquissé quand on aborde les personnages. On se croirait parfois presque à lire un croquis (on s'aperçoit que c'est faux en voyant la tête des croquis en fin de tome… mais comment arrive-t-il à se relire ?).

Pourtant, cela nous replonge dans une autre bande dessinée, une autre science-fiction, qui a inspiré les plus grands, et pas seulement des français. Non, des géants du cinéma ont été influencés par Druillet et sa démesure, par son délire créateur. C'est sûr, ceux qui n'aiment pas le style de l'auteur n'y entreront pas par ce tome. En ce qui me concerne, je suis toujours partagé, comme c'est le cas depuis que j'ai découvert l'auteur par Les 6 voyages de Lone Sloane. J'adore la démesure, l'univers visuel totalement géométrique, la sensation de partir dans des univers improbables. Par contre, j'ai beaucoup plus de mal avec les personnages où les actions quand je ne sais pas trop ce que je regarde.

En tous cas, pour ceux qui attendaient, fini l'attente. Delirius 2 est là. Ne reste plus qu'à se laisser happer.