La famille Pratt avait un ranch dans lequel ils élevaient des chevaux, des quarter horses, complets et rapides. Parmi les dix enfants Pratt, Adaline était l'aînée des filles. Passionnée d'équitation elle venait d'avoir dix-huit ans. Pourquoi avoir attendu ce moment pour tenter de s'opposer à son père qui violait sa petite sur Emily depuis des années ? Sans doute par peur. Parce que Joseph Pratt n'était pas le genre de personne à qui on s'opposait, à qui on disait non. Mais Adaline n'en pouvait plus. Plus de tous ses visages souriant qui faisaient comme si tout se passait bien dans le meilleur des mondes. Ah, c'est sûr que Joseph parlait beaucoup de Dieu, mais le seul petit Jésus que la famille voyait se trouvait sous sa braguette. C'est armée d'un poinçon qu'elle tenta de parler à son père. Résultat, il la frappa, et quand sa mère arriva inopinément dans la cuisine où la scène se passait, elle fit demi-tour pour laisser Joseph corriger Adaline à sa manière.
Mais le pire était à venir. Parce qu'une bande, nombreuse, d'infectés arriva sur le ranch. Des hommes, des femmes, des enfants, tous mus par cette volonté implaccable de faire le mal, se faire mal et faire mal. Les Pratt ne mirent pas longtemps à comprendre que la menace était réelle et qu'il fallait qu'ils réagissent dans l'instant, quitte à tuer ces créatures. Pour survivre, Adaline dû même faire alliance avec son père. Mais c'est ce qui permit au groupe de survivre. Seulement, ce n'était pas parce qu'il avait trouvé un nouveau lieu bien protégé que les vieilles habitudes allaient se perdre. Adaline était souvent absente puisqu'elle allait sur les routes pour protéger le sanctuaire et prévenir tout le monde en cas de réel danger. De temps en temps, elle revenait. Et cette fois-ci, elle découvrit que rien n'avait changé. Elle devait une nouvelle fois se confronter à son père. Mais elle était à présent plus forte. Cela changerait-il quelque chose ?
Le couple d'auteurs Garth Ennis/Jacen Burrows a laissé tomber la série Crossed. On aurait pu croire que la série allait mourir, eh bien non. Mais devant la caractère particulier de celle-ci, il fallait des auteurs forts pour la reprendre, et certainement un peu timbrés. David Lapham et Javier Barreno sont-ils à la hauteur de ce challenge ? Petit rappel pour ceux qui n'auraient pas suivi, Milady a quand même collé un autocollant d'avertissement "Ce comic est violent, amoral et profondément malsain". Et ce n'est pas de la fausse pub que cet avertissement. Même ceux qui aiment les choses violentes n'apprécieront peut-être pas ce comic. Surtout que ce one shot, sous-titré Valeurs familiales attaque les bases de la famille et même de la religion.
Donc, David Lapham a parfaitement repris en main le monde. Le personnage de la mère cadre à 200% dans l'esprit de la série. La scène où elle s'endort dans un endroit bien chaud dont je ne parlerais pas ici est très bien trouvé. Et d'ailleurs, il n'y a pas que les infectés qui sont à maudire dans ce tome, comme le résumé le laisse à penser. Joseph, le père qui tient toute sa petite famille sous son joug mérite bien de se faire éclater les burnes. Mais la mère qui ferme les yeux et tourne les talons ? Et les grands-frères qui ne disent rien non plus par peur de tout perdre ? Pas étonnant alors qu'Adaline n'en ressorte pas totalement indemne. Elle pète parfois aussi les plombs en voulant protéger sa petite communauté. À la fin, c'est même fait de manière grandiose dans le gore. Du coup, ce mélange d'horreur du côté infectés mais du côté humains aussi donne une nouvelle dimension abjecte au récit.
Javier Barreno de son côté s'en sort plutôt bien dans le dessin. Il n'est pas aussi à l'aise que Jacen Burrows, selon moi. Ses personnages ont des problèmes de proportions par moment (surtout avec Jethro), dans les scènes avec beaucoup de protagonistes les personnages sont parfois seulement esquissés (comme l'attaque du ranch au début) mais il a quand même ce trait qui nous fait tourner les pages et qui nous fait dire qu'il est bien fait pour dessiner cette horreur. D'ailleurs, même si les personnages ne sont pas détaillés au maximum quand ils sont nombreux, je vous conseille quand même de les regarder attentivement. Vous découvrirez des petits détails scabreux qui ajoutent à l'ambiance d'horreur du tome.
Du coup, ce nouveau tome de Crossed tient toutes ses promesses. C'est ignoble et dégueulasse, et c'est pour ça qu'on en redemande