Les Chroniques de l'Imaginaire

Solaris (Solaris - 181)

D'après moi, le thème de la solitude est au moins aussi présent et prégnant que celui de l'enfermement, malgré l'indication de couverture sur "des fictions claustrophobes". Bien sûr, on peut considérer que la solitude est un enfermement en soi ! Quoi qu'il en soit, voici comment j'ai lu ces différentes nouvelles :

Quand les pierres rêvent, d'Ariane Gélinas : Quand ils entendent l'appel des dunes, les habitants de l'oasis vont s'offrir aux Dvergars du désert. Mais le narrateur ne peut laisser sa femme, Mina, le quiter ainsi. Une belle nouvelle triste et onirique.
Les mémoires de Sainte Marcelle, de Karine Raymond : Une étrange communauté religieuse de femmes mises à part, dans une sévère réclusion, afin de favoriser l'éclosion du don. Superbe texte, original et bien écrit, d'autant plus remarquable que c'est le premier de l'auteure à être publié, d'après la revue.
Elle, dans la forêt, de Claude Mercier : Une jeune femme proche de la mort se perd plus ou moins volontairement dans la forêt et décide d'y rester pour toujours. Le thème de la dryade se voit joliment revisité ici.
Les adorateurs de sorcières, de Jean Carlo Lavoie : Jack O'Reiley, détective privé, trouve enfin un adversaire à sa mesure. Cette nouvelle, avec son ambiance entre Indiana Jones et Sherlock Holmes, est très plaisante et légère à lire, surtout étant donné l'atmosphère plutôt sombre de l'ensemble des fictions.
Grand-Duc, de Michel Franskaya : Un ex-humain téléchargé dans la forme d'un hibou survit à l'apocalypse nucléaire. L'image la plus extrême de la solitude ! Encore une belle nouvelle, qui se déroule dans un monde qui évoque de très loin Monarque des glaces, de Monique Laframboise (l'Arctique, le téléchargement d'un humain dans un corps imité d'un animal).
Quand rêve le Murnau, de Jonathan Reynolds : Un cinéma étrange dans une petite ville endormie. Une nouvelle fantastique, aux limites de l'horreur.
Crise phatique, de Denis Roditi : Une étrange petite fille apparaît dans un Paris où la communication ne passe plus. Une nouvelle intéressante et prometteuse, mais dans laquelle je ne suis pas arrivée à entrer.
Le retour en taxi, de Guillaume Marchand : Une histoire de vengeance (mais qui venge qui, et de quoi ?) entre Maroc et Québec, aux frontières du surnaturel. Un texte sympathique, et l'alternance entre ces deux "mondes" différents est plaisante.

Cette fois, dans ses Carnets du Futurible, Mario Tessier, dans un article plein d'allant, aussi érudit que plein de verve, répertorie tous les anthropophages, voire cannibales, qui rôdent dans la littérature et le cinéma de l'imaginaire. Inquiétant de voir qu'il y a autant d'exemples pour illustrer la chanson de Georges Brassens (légèrement modifiée) : "Tout est bon chez l'homme y'a rien à jeter / Sur l'île déserte on peut tout emporter"...

Comme cela m'arrive souvent, j'ai repéré dans Les littéranautes des oeuvres tentantes. En ce qui concerne la partie Lectures, si je n'ai, cette fois, pas été d'accord avec les critiques pour les romans que j'avais lus (Mordre le bouclier, Création...), je n'en ai pas moins pris plaisir à les lire, et les pistes de réflexion sont comme d'habitude intéressantes. On en trouvera d'autres sur le volet exclusivement en ligne (Solaris), notamment en terme de revues prometteuses.