Les Chroniques de l'Imaginaire

La Chambre de Lautréamont (La Chambre de Lautréamont - 1) - Corcal & Edith

Nous sommes en 1871, à Paris. Auguste de Bretagne est un écrivain qui vivote. Il écrit bien quelques livres mettant en scène son héros fétiche, le professeur Maldanar, mais rien qui ne décolle vraiment dans les ventes des libraires. Par ailleurs, Auguste a un frère, Maxime, inspecteur de police de son état et très différent de son frère, et une petite amie, Emily, artiste également. Auguste et Emily fréquentent les zutistes, un cercle d'écrivains et de poètes, qui comprend certains agitateurs comme Rimbaud, Baudelaire, ou encore Charles Clos...

Maxime voit ainsi d'un drôle d'air les fréquentations qu'a son frère avec de tels extrêmistes. Pour autant, tant que son frère ne fait rien de répréhensible, il laisse couler... Auguste vit en location dans une petite chambre où un homme de vingt-quatre ans vient de mourir. Ainsi, il a pu découvrir que le locataire précédent n'était autre qu'un écrivain également. Un écrivain aux idées particulièrement noires, du nom d'Isidore Ducasse, également appelé le Comte de Lautréamont.

Et Isidore a écrit un livre qui a été édité en Belgique, mais qui ne s'est jamais vendu : Les chants de Maldoror. Auguste en a trouvé trois exemplaires dans les vieilles affaires d'Isidore, et il en a conservé un, qu'il a dévoré en une seule nuit. Il semble pour Auguste que la chambre renferme encore une mémoire de l'écrivain décédé. Certaines fois, lorsque le peyotl procuré par Rimbaud trouble les esprits, il semble même que le fantôme du Comte de Lautréamont réapparaît. Et on entend même ses chansons et ses airs de piano qui reviennent de l'au-delà. De quoi alerter Maxime de Bretagne, qui commence l'enquête...

Ce livre paru chez Futuropolis est un one-shot tout à fait particulier. L'histoire qu'il raconte est en partie tirée de la réalité, avec des personnages ayant réellement existé. Une bande dessinée a même été initiée au début du vingtième siècle pour la raconter, et certaines pages en sont ici exhumées pour refaire surface à l'époque actuelle ! Une très belle initiative des auteurs, Edith et Corcal, avec une aventure permise grâce à leur éditeur.

Et il faut bien reconnaître que cela valait la peine ! Le livre peut paraître très intellectuel au premier abord. Certes, ce n'est pas là une oeuvre destinée à un large public de bandes dessinées plus classiques. Cependant, elle trouve parfaitement sa place auprès d'autre pépites parues chez le même éditeur, comme La ligne de fuite, ou le plus récent et merveilleux La belle image, tiré d'un roman de Marcel Aymé.

Graphiquement, on se régale avec les dessins épurés, faisant la part belle au Paris de l'époque, et avec les couleurs tirant principalement sur l'ocre et le sépia, renforçant une atmosphère volontairement vieillie pour notre plus grand plaisir visuel. C'est beau, fin, et cela colle parfaitement à l'histoire qui nous est comptée.

Une très belle histoire, aussi bien dans le livre que dans tout ce qui entoure son édition. La fiction colle à la réalité, et ne peut que provoquer la curiosité et l'envie. Des sentiments qui ne pourront qu'être renforcés par ce joli coup de coeur !