Les "morceaux de nuit" présentés ici sont au nombre de huit. Il s'agit de :
L'homme de sable : Le jeune Nathanaël est obsédé par un mystérieux personnage, Coppelius, partenaire en alchimie de son père, et qui l'a terrorisé quand il était enfant.
Ignace Denner : Andrés et Giorgina, sa femme, accueille un soi-disant voyageur égaré, qui est en fait un bandit voué au démon.
L'église des Jésuites raconte l'histoire d'un peintre inspiré par une muse, et qui perd la plus grande partie de son talent quand elle s'avère une femme réelle, ce qui le rend fou.
Le Sanctus : Une chanteuse qui a perdu la voix la retrouve en écoutant son histoire transposée.
La maison déserte : une maison apparemment déserte ne l'est pas.
Le majorat raconte une histoire de fratricides répétés sous l'empire de la jalousie et de la convoitise de l'or et du pouvoir.
Le voeu : Une jeune femme se retrouve enceinte sans le savoir.
Le coeur de pierre : Le conseiller Reutlinger a prévu d'être enterré sous une plaque de marbre dans laquelle est enchassée une pierre rouge en forme de coeur.
Outre la préface qu'il a signée, le dossier constitué par Pierre Brunel comporte les éléments suivants :
Un long article de Walter Scott dans lequel l'écrivain critique vivement ETA Hoffmann, dont il condamne "l'imagination enfiévrée", dont il estime qu'elle lui a gâché un grand talent de départ.
Une courte critique de Ste Beuve, dans laquelle il soutient que Hoffmann est l'auteur qui a su le mieux dépeindre le tempérament artiste. "Il est évident à la lecture de ces Contes qu'en tout cas le sujet a vivement intéressé Hoffmann : le Nathanaël de L'homme de sable est poète, L'église des jésuites est l'histoire d'un peintre et Le Sanctus celle d'une chanteuse. Quand on sait qu'outre l'écriture Hoffmann pratiquait la peinture et la musique..."
Une biographie succincte de l'auteur et des "notices" des différents contes.
J'ai beaucoup regretté que parmi ces dernières seule celle sur L'homme au sable soit véritablement fouillée, les autres dépassant à peine le stade du résumé quasi exchaustif. Une étude comparée de La marquise d'O, de Kleist, et du Voeu, par exemple, me paraissait s'imposer, étant donné la proximité des thèmes. Par ailleurs, si les notes de bas de page sont nombreuses, elles concernent principalement des choix de traduction, peut-être parlants pour des germanophones, mais qu'un lecteur ne comprenant pas l'allemand peut difficilement apprécier. De ce fait, elles n'apportent pas grand-chose à la compréhension des textes.
Les nouvelles elles-mêmes sont fascinantes, faisant appel aux différents aspects du genre, que ce soit l'attrait pour le mal (Ignace Denner, voire L'homme au sable), les fantômes et visions, "réels" ou pas (L'église des jésuites, Le majorat, Le voeu), le personnage du double (L'homme au sable, La maison déserte, Le majorat, Le coeur de pierre). Pour moi, Le Sanctus est un cas particulier, les travaux de Sigmund Freud rendant difficile de la lire autrement que comme le récit d'un cas de mutité hystérique, ce qui ne la rend pas moins belle et intéressante pour autant, bien sûr.
En somme, la lecture de ces textes confirme que l'auteur est incontournable pour tout amateur du genre, et je ne peux que la recommander vivement.