Les Chroniques de l'Imaginaire

Petites morts - Kloetzer, Laurent

Jaël Fersen est un écrivain romanesque, mettant en scène un personnage qui lui ressemble, Jaël de Kherdan. C'est un bel homme, un don juan. Avec sa chemise à jabots et son épée au côté il courtise les femmes qui se pâment devant lui, aucune ne lui résiste. Et ce sont ses aventures que nous suivons au court de ce recueil.

Les nouvelles sont longues, et régulièrement reliées entre elles par une histoire plus courte avec un personnage récurrent : la magicienne. Cela crée une sorte d'unité malgré le découpage en nouvelles. Jaël évolue ainsi d'une scène à une autre, d'une femme à une autre, dans un décor 18è siècle chargé d'une atmosphère onirique et fantastique. Cet aspect du livre est parfaitement rendu, notamment par le côté gothique qui s'en dégage, avec la forte présence de la nuit, de la forêt, de la lune... Et aussi par le flottement permanent qui règne sur l'histoire entre la réalité et le rêve. Les visages changent, Jaël passe d'un endroit à un autre comme par magie, des scènes étranges prennent place, relevant du fantasme.

Et c'est justement ce qui est très déstabilisant : l'histoire est vraiment difficile à suivre. A plusieurs moments, on ne sait pas très bien si on parle du personnage ou de l'écrivain. Si on est dans le réel ou dans le rêve. Et plus le récit avance, moins on comprend. Les personnages disparaissent, réapparaissent, Jaël s'endort quelque part et recommence ailleurs une nouvelle vie. L'onirique occupe tout le devant de la scène, si bien que la trame de l'histoire est rendue totalement floue. Puis une nouvelle vient tout remettre en question, et à ce moment là on peut légitimement penser que cet éclairage nouveau va aider le lecteur, mais en réalité c'est tout l'inverse qui se produit. De plus il ne se passe pas grand chose de trépidant. On s'attend à un Casanova mais les rencontres charnelles sont presque trop pudiques, donc ennuyeuses. La vision donnée de la femme n'est pas très reluisante non plus : elles tombent comme des mouches devant lui, se livrent à tous ses caprices, mais le plus choquant est la scène du viol collectif qui excite complètement notre personnage.

Pourtant, l'écriture est vraiment très belle, joliment rythmée, cela donne vraiment envie d'adhérer au texte. Mais à titre personnel, malgré mes efforts, je n'ai rien compris à l'histoire.