Nous sommes dans le royaume d'Asgard, où des hommes rudes vénèrent des dieux comme Odin, Thor ou Loki, en vivant du fruit de leur pêche, et de leurs attaques meurtrières à bord de leurs drakkars. Pour le moment, Leïf est un homme nouvellement papa. Sa femme vient de lui donner un fils, mais les dieux l'ont affublé d'un défaut insultant : l'enfant est un skraëling, car il est né avec un pied manquant. Le châtiment dans ce cas est normalement sans appel : Leïf doit tuer son propre bébé, immédiatement. Mais Leïf ne peut s'y résoudre, et provoque même les dieux, en appelant son fils Asgard, comme le royaume qui le refuse...
Quarante années plus tard, Asgard a bien grandi. On le nomme Pied-de-fer, et il est un redoutable chasseur de tout ce qui bouge ou nage. Justement, le roi Godfred est très ennuyé. Un redoutable monstre marin, le Krökken, sème la terreur parmi les drakkars de pêcheurs. Il est impossible de partir au combat également, et les hommes s'impatientent. Ils s'ennuient, et s'inquiètent également du manque de nourriture qui commence à se faire sentie. Alors, Godfred n'a d'autre choix que de faire appel à Asgard pour tuer le Krökken, et de convaincre également Gözlin, son fidèle bras droit d'accepter ce choix.
En attendant, Asgard a réussi à sauver une fillette appelée Sieglind des mâchoires du monstre marin. Sieglind vit avec son frère, dans une modeste demeure, loin du village. Elle et son frère sont les descendants d'esclaves affranchis, et ne sont pas vraiment la caste la mieux vue des villageois. Un point commun avec Asgard, qui accepte d'aller chasser le serpent gigantesque. Un serpent dont on dit qu'il serait une descendance des dieux...
Nous n'en sommes pas au coup d'essai entre Xavier Dorison au scénario et Ralph Meyer au dessin, après la très remarquée participation au premier tome de XIII Mistery. Ici, rien à voir avec la célèbre série de Jean Van Hamme, puisque c'est dans les pays nordiques que les deux hommes nous amènent dans le premier tome de ce qui sera un diptyque. Il faut bien reconnaître que l'album est pour le moins parfaitement maîtrisé, et ce du début à la fin.
Les dessins sont superbes, d'abord, avec l'utilisation de grands aplats noirs, et de somptueux jeux avec les ombres notamment. La lumière est également mise à profit, ainsi que les paysages brumeux qui nous plongent dans l'expectative de ce qui risque de surgir à tout moment au fil des pages. L'ambiance graphique est, vous l'aurez compris, un élément très important de ce livre.
De quoi sérieusement aider le récit donc. On passe sur une présentation rapide des personnages, tout à fait suffisante grâce à la force graphique des dessins, sur les personnages et leurs expressions taillées parfois à la serpe. Les temps et les lieux sont durs, et cela suinte littéralement de ces planches. Le récit est parfaitement cohérent, rythmé, et fait parfaitement mouche dans cette histoire de vikings mis en difficulté par une créature démoniaque, elle même de toute beauté dans les cases ou les pages complètes qui nous permettent de l'apercevoir.
Un premier tome qui fait totalement mouche, et qui répond parfaitement aux attentes que l'on est de plus en plus en droit d'avoir lorsqu'on aperçoit les noms de Dorison ou de Meyer sur une bande-dessinée : du grand art qui sort du lot !