Dans ce livre, qui a reçu le Prix Renaudot en 2011, Emmanuel Carrère raconte la vie de l'écrivain et homme politique russe Edward Limonov, depuis sa naissance en 1943. Pour l'écrire, il s'est basé sur les propres récits autobiographiques de son sujet, entremêlés d'autres témoignages pertinents et de souvenirs personnels.
Le personnage de Limonov est clairement un personnage de roman : né d'un père tchékiste (c'est-à-dire membre de la police secrète, la Tchéka étant par la suite devenue le KGB, plus connu), poète dans sa jeunesse, ce qui l'a amené à fréquenter l'underground moscovite des années soixante, il s'est ensuite exilé à New York où, de coqueluche des salons, il est devenu un clochard puis le majordome d'un milliardaire, tout en écrivant le récit de sa vie et de ses expériences. Le premier de ses livres a eu un grand succès en français, et il a séjourné une dizaine d'années à Paris dans les années quatre vingts. Retourné en Russie après la chute du Mur de Berlin, il a fondé plusieurs partis politiques d'opposition, et séjourné quatre ans en prison.
Toute la partie américaine et parisienne m'a paru très longue, peut-être parce que la situation à Moscou à l'époque de la perestroika et depuis m'intéresse bien davantage, et me parait beaucoup moins rebattue que les aventures socialo-sexuelles d'un jeune immigré paumé à New York, ou d'un écrivain scandaleux à succès à Paris. Ce qui m'a beaucoup plu, c'est la façon dont Carrère fait oeuvre pédagogique pour "dé-tricoter", à l'usage d'un lecteur français bien intentionné mais ignorant, l'histoire compliquée de l'évolution récente des Balkans, ou la politique russe.
L'écoute se prête bien à un tel roman, que l'on suit facilement "en épisodes", comme si Le comte de Monte Cristo était raconté à la radio, et c'est fort bien dit par Jacques Frantz.