Tom, cliologue, c'est-à-dire à la fois historien et statisticien, n'arrive pas à comprendre pourquoi le village d'Eifelheim, dépeuplé par la Peste noire en 1348-1349, n'a jamais été repeuplé par la suite. Son agitation dérangeant Sharon, sa compagne physicienne en plein travail intellectuel, il va chercher refuge, et accessoirement des documents qui l'aideraient dans ses recherches, à la bibliothèque universitaire. Et il s'avère que l'une des bibliothécaires, Judy Cao, va s'enthousiasmer pour ses recherches. Elle commence par l'informer qu'au départ le village s'appelait Oberhochwald...
Où, un beau matin d'été 1348, le pasteur Dietrich se réveille avec une prémonition d'orage, alors que le ciel est parfaitement pur. Puis le calme est fracassé par un bruit énorme, et il va voir dans la forêt ce qui l'a causé. Il y trouve, parmi des arbres brisés, des êtres étranges et étrangers, dont certains semblent blessés, et avec lesquels il n'est pas facile de communiquer au premier abord.
C'est l'histoire de ces relations, en parallèle de celle des recherches de Tom (et de Sharon) que raconte le roman.
Préfacé par Gérard Klein, complété d'annexes donnant des limites précises à l'histoire et à la science par rapport à la fiction, ce roman est solidement étayé dans toutes ses parties et fort intéressant. D'abord, malgré l'atmosphère moyennâgeuse, très bien rendue d'ailleurs, qui en occupe une grande partie, il s'agit incontestablement de SF, et on ne peut même pas parler d'uchronie, contrairement à ce qui se passe avec Le livre de Cendres, de Mary Gentle, par exemple.
Ensuite, la qualité même de l'écriture (malgré cette citation de Shakespeare, inutile et anachronique, à la page 351), qui rend très vivante, très présente, cette société disparue à la fois religieuse (au sens notamment où chaque jour est une fête de saint) et très rationnelle.
Enfin, les personnages sont cohérents et touchants, tant les "modernes" que les "anciens" (avec le merveilleux pasteur Dietrich ou son agaçant Joachim) ou les autres.
En somme, un bon roman original, dépaysant, dont tout amateur de SF devrait être curieux.