Les Chroniques de l'Imaginaire

Le requiem d'un soupir - Schneuwly, Tiffany

Tiffany Schneuwly fait partie de ces jeunes filles qui n’ont pas pu profiter pleinement de leur adolescence. Dès l'âge de treize ans elle a dû faire face à de gros problèmes respiratoires, de l’asthme, dont certaines crises furent très graves. Ce n’est qu’à dix-sept ans qu’un traitement adapté et efficace lui fut proposé. Pendant quatre années, elle s’est repliée sur elle-même, communiquant peu avec ses camarades de classe et sa famille. Il lui a fallu attendre que son état soit stabilisé pour enfin réussir à reprendre une vie normale .

L’auteure a éprouvé le besoin de coucher cette souffrance sur papier. D’une part pour faire le deuil de ces années difficiles, et d’autre part pour montrer comme il est handicapant d’être asthmatique. Pour ce faire elle s’est appuyée sur une histoire fictive, même si celle-ci porte nécessairement une dimension autiobiographique.

Mercedes a dix-neuf ans. Ses deux meilleures amies lui sont d’un soutien sans faille, savent ce qu’il faut faire quand elle fait une crise et comment lui changer les idées. Malgré cela, Mercedes se sent coupable d’être une source d’inquiétude permanente pour sa famille et ses amis. C’est alors qu’une étrange petite fille va faire son apparition pour l’aiguiller, et l’aider à accepter et apprécier sa vie telle qu’elle est.

Comme toutes les jeunes filles de dix-neuf ans, Mercedes est partagée entre ses copines, ses études et l’amour. Et ce roman pourrait n’être qu’une histoire comme une autre. Mais l’épée de Damoclès toujours présente au-dessus de la tête de Mercedes donne une intensité particulière au récit. Car on se rend bien compte à quel point cet asthme, qu’on prend communément pour une affection bénigne, peut pourrir une vie. Une crise peut survenir à tout moment, en classe, lors d’une soirée entre amis, et même en dormant. Le récit de Tiffany Schneuwly est éloquent, car combien de fois Mercedes s'est elle réveillée à l'hôpital alors qu'elle ne faisait rien de particulièrement éprouvant. Les crises surgissent vraiment à tout moment. C'est d'autant plus difficile à vivre lorsqu'un professeur la pointe du doigt en la faisant passer pour une paresseuse qui n'a rien trouvé de mieux pour sécher les cours que prétexter des soucis de santé. Le petite note de fantaisie apportée par la petite fille imaginaire, porteuse de sagesse et d'espoir, apporte une fraîcheur salutaire à l'histoire.

Un bémol cependant : ce roman comporte certaines bizarreries. Mercedes est au collège alors qu’elle va passer le baccalauréat, elle trouve un billet de dix francs en 2004, possède un portable qui affiche la photo de son amie quand elle lui téléphone alors que cela ne se faisait pas encore à l’époque… Mais on passe facilement au-dessus de ces anachronismes tant l’émotion est au rendez-vous, et le soin apporté à l’écriture manifeste. Nous vivons aux côtés de Mercedes sa vie de jeune fille, aves ses hauts et ses bas, et cela produit un récit très frais et plaisant malgré le poids du message transmis.