Deux Suisses se rencontrent par hasard dans un café de Provence. Martijn reprend la route pour Berne le lendemain, et comme Adrian, le narrateur, repart le même jour, ils conviennent de faire le voyage à deux. Au cours du trajet, des arrêts pour déjeuner, pour dormir, Martijn va longuement raconter l'histoire de sa fille Léa, par épisodes. Il trouvera une oreille attentive auprès d'Adrian, étrangement fasciné par son compagnon de voyage.
Léa a perdu le sourire depuis le décès de sa mère, emportée par une leucémie. Pourtant, son père aperçoit une lueur d'espoir lorsque dans une gare, la petite fille est subjuguée par le jeu d'une violoniste. De là naîtra une grande passion, dévorante et destructrice, qui mènera Léa et son père sur une pente dangereuse et fatale.
Avec le récit enchâssé de l'histoire de Léa, nous suivons en même temps qu'Adrian les différentes épreuves subies par Martjin, épreuves qui se lisent encore sur son visage des mois après. Les émotions sont donc transmises à un double niveau : telles que vécues et racontées par Martijn et telles que ressenties par Adrian. Cela donne un roman très fort, sensible, dont on a du mal à se défaire après lecture. Bien que le dénouement soit sous-entendu dès le départ, le lecteur est totalement happé par le destin tragique et inexorable de Léa. Les personnages sont d'emblée attachants, surtout la petite fille, qu'on voit grandir et se transformer en violoniste adulée et acclamée, avant de glisser vers la folie. Le regard de Martijn sur sa fille est à la fois teinté d'amour, de regrets et de désespoir. Il est le personnage le plus marquant du récit, celui auquel on parvient le plus à s'identifier et avec qui on partage un sentiment d'impuissance.
Pourtant l'histoire souffre de quelques longueurs qui alourdissent le récit, généralement fluide et très agréable à lire. L'action du temps présent repose uniquement sur l'écoute. Hadrian intervient très peu, se contentant de penser en lui-même la plupart du temps. Cette absence d'interactivité entre les deux voyageurs est déroutante et fait même défaut à mon sens.
Malgré cela, Léa est un très beau roman, triste et émouvant, qu'on retiendra surtout pour l'histoire d'amour tragique de Léa pour sa musique.