Les Chroniques de l'Imaginaire

Cowboy angels - McAuley, Paul

Des mondes parallèles dans lesquels une troisième Guerre Mondiale a causé des milliards de morts, d'autres où l'Amérique est communiste, d'autres encore vierges de toute civilisation humaine... Tels sont quelques uns des divers "faisceaux" où l'Histoire a divergé de celle du Réel, et auxquels on accède via les Portes de Turing depuis 1966. La découverte étant américaine, et les Américains étant ce qu'ils sont, ils ont mis en place une toute-puissante Compagnie ayant pour mission de "libérer" toutes ces Amériques parallèles et d'asseoir l'hégémonie américaine.

Jusqu'à l'élection de Jimmy Carter en 1981. Pacifiste, le nouveau Président des Etats-Unis a mis un terme aux guerres de libération menées par la Compagnie, signant par là même la fin de son influence. Adam Stone, membre des Op'Spé de la Compagnie, en a profité pour prendre sa retraite comme fermier dans un faisceau "sauvage". Il espérait bien ne plus jamais entendre parler de tout ça.

C'était sans compter sur le côté chien fou de son ancien collègue et ami Tom Waverly, lui aussi ex "as de la voltige" de la Compagnie [les fameux "cowboy angels" évoqués dans le titre de l'ouvrage étant toujours évoqués sous cette désignation]. Celui-ci s'est baladé de faisceau en faisceau pour éliminer d'une demi-douzaine de manières différentes les doubles d'une brillante mathématicienne, Eileen Barrie. La Compagnie espère utiliser Adam comme appât pour mettre la main sur Tom ; celui-ci espère sauver la peau de Tom, qui lui a autrefois sauvé la vie, avant qu'il ne soit abattu à vue. Il va vite découvrir qu'il vient de foncer tête baissée dans un panier de crabes...

La première moitié du roman ressemble à un jeu de piste : le pauvre Adam n'a qu'un minimum de billes et se fait mener en bateau tant par la Compagnie que par son "ami" Tom. Tous lui demandent de lui faire confiance et d'être un gentil petit soldat, et si ça l'irrite profondément, il laisse quand même faire. Jusqu'à ce que les choses prennent un tour plus personnel, et qu'il décide de prendre quelques initiatives. Sauf qu'il veut faire les choses à sa façon, et Tom aussi, or ils n'ont pas du tout les mêmes façons de travailler : Adam préfère appeler la cavalerie à la rescousse, tandis que Tom préfère jouer au cow-boy solitaire et sortir son flingue à tout-va, tout en jouant l'énigmatique même vis-à-vis de ses amis ! Et donc ils passent la deuxième moitié du bouquin à se chamailler et à se sauter dessus pour reprendre possession du revolver (ou toute autre arme qui leur passe entre les mains à ce moment-là) et donc mener le jeu. Au début c'est sympa mais ça finit par devenir un peu exaspérant, quand même !

Les différents univers parallèles que l'on rencontre ressemblent au Réel dans les grandes lignes, sauf dans les dernières décennies, ce que l'auteur explique (ou plutôt n'explique pas) par une règle de fonctionnement des Portes de Turing. Ils sont donc sans grande surprise. J'avoue avoir interrompu ma lecture en cours pour revenir au début en prenant des notes, parce que je confondais méchamment les différents faisceaux... Un petit récapitulatif des faisceaux rencontrés avec un bref aperçu de ce qui avait divergé dans leur Histoire aurait été bien utile ! Dommage également que tout cela soit si américano-centré (l'auteur n'est pourtant pas américain !).

La bonne idée cependant, c'est d'avoir combiné les univers parallèles et le voyage dans le temps, ce qui rend le tout bien plus riche. Les boucles temporelles piègent en effet les personnages principaux, qui ne savent plus trop comment en sortir.
J'ai cependant la sensation que le scénario n'exploite pas au mieux ces éléments. D'ailleurs, tout retombe comme un soufflé à la fin.

Beaucoup d'action très musclée, du suspense, des éléments de science-fiction, ce roman est très vivant mais reste un poil décevant : avec ces cartes en main, Paul McAuley aurait certainement pu faire mieux !