Les Chroniques de l'Imaginaire

Quand blanchit le monde - Shamsie, Kamila

C'est chez Elizabeth et James Burton, à Delhi, que Hiroko Tanaka, marquée par la bombe qui a tué Konrad Weiss, le frère d'Elizabeth, à Nagasaki, rencontre Sajjad Ashraf. Ces derniers mois bouillonnants d'avant la fin du Raj et la Partition, ne sont pourtant pas favorables aux amours naissantes, non plus d'ailleurs qu'aux couples qui ne savent plus guère se parler.

Près de vingt ans plus tard, à Karachi, Harry Burton, le fils d'Elizabeth et James, qui, devenu adulte, travaille pour la CIA, devient l'idole et l'espoir de Raza Ashraf. Mais c'est une idole ambiguë, et Raza qui, à seize ans, cherche son identité et ne sait pas grand-chose des réalités du monde, part avec son ami afghan Abdullah dans un camp de moudjahiddin qui luttent contre les soviétiques.

Ce beau roman, à la fois touffu et limpide, se déroule entre Nagasaki puis Delhi, Karachi et New York, et s'articule autour de trois temps forts de l'Histoire, pierres de touche où s'aiguisent les personnages, notamment Hiroko, seule à être présente dans les trois parties. En effet, l'histoire commence le jour de l'attaque nucléaire américaine sur Nagasaki et se termine peu après les attentats du 11 septembre 2001, dans une Amérique encore traumatisée et totalement paranoïaque, ce que reflète parfaitement le personnage de Kim Burton.

J'ai trouvé remarquable la façon dont l'auteure a réussi à entrelacer, sur trois générations, la vie de ses personnages entre eux et aux faits historiques violents dont ils ont été témoins et qui les ont marqués. Chacun d'entre eux est cohérent, attachant à sa façon particulière, même ceux qu'on ne voit qu'en passant (la mère de Sajjad, par exemple, ou Ismail, le frère d'Abdullah).

L'écriture est à la fois poétique et précise, les atmosphères se perçoivent parfaitement. De surcroît, c'est une façon de raconter les trois faits historiques, et le Pakistan dont l'auteure est originaire, d'une façon originale et sensible. Vraiment un excellent moment de lecture, que je ne saurais trop recommander.