Les Chroniques de l'Imaginaire

Le sang du désert - Gaspar De Alba, Alicia

Dans l'avion qui la ramène à El Paso, Ivon découvre avec horreur un article consacré aux meurtres non-résolus de dizaines de femmes à Juarez, juste de l'autre côté de la frontière mexicaine. Comment a-t-elle pu ne jamais entendre parler de ces crimes qui se déroulent pourtant à quelques mètres de sa ville natale ? Enfin, elle ne revient pas pour cela mais pour venir chercher un bébé, son bébé, celui qu'elle et sa compagne vont adopter. Sa cousine Ximena s'est occupée de tout. La jeune future maman, Cecilia, est employée dans une maquiladora, une de ces usines qui exploitent la misère mexicaine. Ivon doit la rencontrer le soir même, à la sortie de son travail mais arrivée sur place, Cécilia est déjà partie. Elle sera retrouvée peu après morte et horriblement mutilée dans le désert. Elle rejoint les plus de cent femmes ainsi assassinées. Le bébé qu'elle portait n'a pas été épargné. Pour Ivon, c'est le début d'un long cauchemar qui va l’entraîner loin, très loin dans l'horreur.

Evitez de lire la quatrième de couverture avant de découvrir ce roman. Elle en révèle trop, bien trop.

Même si les personnages de ce roman sont fictifs, les meurtres irrésolus de femmes à la frontière des villes d'El paso et de Juarez sont une bien triste réalité. Depuis 1993, ce sont des centaines de victimes qui sont à déplorer et les coupables courent toujours. Alicia Gaspar de Alba se base sur quatre années d'investigation ainsi que sur son expérience personnelle de la situation pour proposer, sous la forme d'un thriller, une hypothèse sur la situation. Une possible réponse aux questions qui et pourquoi tant de femmes sont retrouvées mortes dans le désert mexicain ?

Bien évidemment, ce roman reste une fiction mais avec un fond de réalité qui la dépasse. Comment imaginer que tant de femmes aient pu être impunément assassinées ? L’auteur nous brosse un portrait noir de cette société où les femmes sont si peu considérées, encore plus si elles appartiennent aux basses couches de la société. Extrême pauvreté, autorités dépassées voir corrompues, gangs tout puissants, locaux fatalistes, organisations féministes et humanitaires qui ont le sentiment de se battre contre des moulins à vent, l'auteur retranscrit bien le climat qui règne à Juarez, souvent considérée comme la ville la plus violente au monde. Un thriller efficace, dur, violent, qui n'épargne aucune atrocité au lecteur. Mais cette violence est nécessaire pour ne pas oublier, en espérant qu'un jour, toute la lumière soit faite sur ces crimes et qu'enfin, on puisse dire Ni Una Mas!, pas une de plus !