Pour Jern, c'en est fini du cirque : le vieil Olym a racheté son contrat, pour qu'il l'accompagne dans une dangereuse aventure au cours de laquelle des talents de jongleur sont nécessaires. Mais en fait ce n'est pas la seule raison de son choix, puisqu'il lui remet - étrange feuille de route ! - une version holographique de l'Arcane I, Le Bateleur, qui a son propre visage.
A l'auberge où Olym a donné rendez-vous à Jern, un deuxième Arcane, celui de la Force, ne tarde pas à apparaître, sous les traits de la Guerrière Aléna, cette enfant porteuse d'un symbiote qui lui donne ses talents pour les armes, mais qui la fait vieillir très vite. Quand il revient, Olym, L'Hermite, ramène avec lui Dorian, Le Mat, un bouffon à la mémoire encyclopédique. Ils sont au complet à présent, le Jeu peut commencer. Entre eux quatre, des liens complexes vont peu à peu se nouer.
Premier roman de l'auteur d'Etoiles mortes, Le jeu des sabliers n'en révèle pas moins, fût-ce de façon discrète, les caractéristiques de l'écrivain. Le style est fluide, élégant et précis, il y a un bon nombre d'idées originales (il est bon de rappeler à ce propos que si le texte a été publié par I.S.F. en 2003 dans la version reprise ici, il avait d'abord paru en 1987-1988 au Fleuve Noir, en deux tomes, ce qui était une absurdité étant donné l'importance de la numérotation de deux chapitres au moins), telles que les vaisseaux organiques, les Lanceurs de pierres, et bien sûr les sabliers eux-mêmes.
Le thème de la Quête est encore plus vieux que le Graal, mais il n'en a pas moins permis des réussites incontestables, et je pense en l'occurrence principalement à Nova, de Delany, dont il m'a semblé retrouver ici un avatar de la Souris. A ce propos, si les personnages n'ont pas beaucoup plus d'épaisseur que des Lames de Tarot, ils n'en ont pas moins quelque chose d'archétypal qui permet de se sentir en familiarité avec eux.
Les connaisseurs du Tarot de Marseille apprécieront la construction qui désigne à bon escient le chapitre XIII, non nommé comme il se doit, et combien le nom de Lame de chaque chapitre éclaire son contenu. A ce propos, on remarquera que les Lames se suivent à partir de la XVI (chapitre 10) jusqu'à la fin, avec la XIII comme Soleil Noir, trou noir, ce qui m'a paru logique.
En somme, un roman très plaisant à lire, dont on espère que la réédition lui gagnera de nouveaux lecteurs, et qui, s'il n'est pas le texte le plus abouti de son auteur, donnera au moins le goût de continuer à lire du Dunyach.