Sur une route de campagne, un soir entre chien et loup, Marie heurte un cycliste, l'envoie violemment dans le fossé, remonte en voiture et s'enfuit. S'enfuit loin, sans vouloir savoir, surtout pas, sans penser. Elle ne veut qu'aller loin, le plus loin possible, de sa vie, d'elle-même, de ce mort inconnu, de sa lâcheté... De tout, enfin.
Et un jour elle découvre l'identité de celle qui est morte par sa faute, et que l'accident a eu lieu à tout au plus cent kilomètres de la ferme où elle a échoué. Qui a dit "Le vrai voyage, c'est le retour" ?
L'auteure décrit remarquablement, dans ce roman doux-amer, l'absence à soi, la dépossession de soi, et les ravages qui en découlent, pour soi et pour les autres. En effet, tous les personnages semblent perdus à côté d'eux-mêmes, pour une raison ou une autre, à commencer par Claire, l'innocente, la simplette, et Marie, bien sûr. C'est d'ailleurs le heurt de ces deux absences qui va porter Marie au bout de sa logique de vie, jusqu'à imaginer une vie complète, de routine dépossédée, auprès d'un médiocre brutal qu'elle n'aime pas, puis lui indiquer le chemin vers autre chose, vers Emile, qui a toujours eu tant de mal à rester quelque part, et qui ne sait communiquer qu'avec les choses, et Gaspard, dont la lâcheté complète celle de Marie et qui se retire de sa vie à mesure que sa vue s'en va. Le chemin vers elle-même, qu'il s'agit de rencontrer, enfin.
L'illustration de couverture est très appropriée, car c'est vraiment un tableau impressionniste que compose Isabelle Pestre, par toutes petites touches presque invisibles mais néanmoins indispensables. Vraiment un excellent moment de lecture que ce second roman d'une jeune écrivaine dont il faut absolument retenir le nom.
