Le docteur Hirschfeld, personnnage mystérieux ayant réellement existé, est un sexologue sulfureux, exerçant son art en Allemagne, dans les années 30. Il s'est spécialisé dans les déviances sexuelles masculines, homosexualité, travestisme, fétichisme. Lui-même homosexuel notoire, il vient en aide à ceux qui n'assument pas leur sexualité. Lorsque les nazis arrivent au pouvoir, il est contraint de fuir Berlin et d'abandonner son célèbre Institut des sciences sexuelles. Avant de partir, il confie la précieuse liste de ses patients à l'un d'entre eux, Karl, et lui demande de la mettre à l'abri dans un coffre bancaire.
Le roman de Nicolas Verdan fait de multiples aller-retour entre 1933, lorsque Karl est le patient du docteur, et 1958 lorsque le Mossad recherche activement cette liste pour retrouver certains nazis.
Petit à petit, on découvre les secrets inavoués de certains personnages, comme Blume, responsable du Bureau des Mariages, qui n'autorise les jeunes gens à se marier que s'ils correspondent aux critères eugéniques nazis.
Sans jamais croiser le docteur (on ne fait que lire ses dossiers, ou se remémorer une de ses remarques), on entre dans son univers avec facilité. La prouesse de Nicolas Verdan est de lâcher les informations au compte-goutte. Au fil des chapitres, on découvre que Karl est bien différent de ce que l'on s'imaginait, de même pour d'autres personnages importants qui, au final, se révèlent à l'opposé de ce qu'ils paraissent.
Ce roman n'est pas à proprement parler un énième roman sur les nazis et leurs horreurs, mais plutôt un témoignage sur les interrogations que se posent les hommes à propos de leur sexualité, et sur la notion de normalité, de différences, d'exclusions, en temps de guerre, puis en temps de paix, de reconstruction.
Très bien documenté, ce roman se lit facilement, avec intérêt et plaisir.