Depuis des années, c'est pour moi un plaisir attendu de découvrir la nouvelle gagnante du Prix Solaris, et la livraison 2012 ne fait pas exception avec, cette année, Le jardin des derniers humains, de Jean-Louis Trudel : quand un sculpteur réputé choisit un village des Cinque Terre pour construire le premier "totem" que lui a commandé l'Union, la propriétaire de la maison engloutie dont il veut utiliser les pierres refuse. Même sans connaître les concurrentes de cette belle et originale nouvelle, je ne peux qu'estimer cette récompense amplement méritée. L'atmosphère est particulièrement travaillée, mais les personnages aussi sont intéressants et attachants, malgré le format court.
Aux frontières de l'impossible, de Mario Tessier : Une nouvelle à tiroirs sous la forme de la présentation d'une série TV culte. Très calé, très intelligent, bourré de références, mais dont je ne me sens pas vraiment de parler, du fait que la plupart desdites références m'ont échappé, inculte télévisuelle que je suis.
Petit Poucet en salade, de Geneviève F. Goulet : Le plat le plus prometteur peut être gâché par un ingrédient. Cette nouvelle courte et savoureuse confirme le talent de l'auteure de cette nouvelle originale qu'était Les pantoufles de Louis XVI, parue il y a deux ans, dans le numéro 175.
Le disséminateur, de Philippe-Aubert Côté : Entre animal et végétal, un prédateur revenu de loin. Une autre excellente et originale nouvelle d'un autre auteur que j'ai découvert en lisant la revue, et dont j'ai bien aimé les textes, notamment Pour l'honneur d'un Nohaum, parue dans le numéro 176.
L'étrange cas du 234, Joseph Bouchette, de Guillaume Bourque : Une force maléfique semble se manifester, de façon plutôt humoristique, lors d'une fête d'adolescents. L'idée de départ me plaisait beaucoup, comme d'ailleurs le ton de la nouvelle, mais je l'ai trouvée un peu longuette.
Les amants liquides, de Romain Benassaya : Comment trouver son âme soeur, quand on est dans un corps de mollusque, surtout sur une planète où tous sont beaux ? Encore une idée de départ intéressante, dans une atmosphère un peu à la Vance, prometteuse, donc, mais que j'ai trouvée un peu trop didactique pour mon goût.
Les dieux pure laine, de Luc Dagenais : C'est pas une vie d'être un dieu retraité, et Raoul en a plus que marre de la maison de retraite aux menus répétitifs, et de la vieillesse, et même de son Yvette ! Il faut agir ! Vous vous souvenez de La vie des douze Jésus, prix Solaris 2009 ? Forcément, ça ne s'oublie pas (et au cas où, rafraichissez-vous la mémoire ici). Eh bien c'est le même auteur, le même style, c'est évidemment complètement différent si tout aussi réjouissant. Vraiment une excellente nouvelle, qui rend un hommage bien déjanté à Gaiman.
Une parfaite correspondance, de Steve Stanton : Shyla et Ryin s'aiment, et aiment leur fils Kit, mais c'est si dur de s'en sortir, dans ce monde ! Très belle nouvelle, très réussie, très bien écrite, qui réussit malgré son format à donner une idée assez précise du monde et de la société dans laquelle elle se déroule.
La Science-Fiction et l'Anthropologie : des récits entrecroisés, première partie : des origines aux livres univers, de Martin Hébert, montre de quelle façon les récits anthropologiques et ceux des littératures de l'Imaginaire se sont influencés et fécondés mutuellement. Une recherche fascinante, dont j'attends la suite avec le plus grand intérêt.
Le Thérémine ou la première musique électronique est l'objet des Carnets du Futurible de Mario Tessier. Cet instrument inventé par un physicien russe génial, Leon Theremin, a été beaucoup utilisé dans les films de SF, pour ses sonorités étranges, mais pas seulement. Une découverte passionnante, comme d'habitude accompagnée d'une bibliographie et webographie importantes, augmentées cette fois d'une riche discographie.
Dans la rubrique des Littéranautes, comme toujours d'une lecture profitable, j'ai relevé cette fois une chronique intrigante de Pascale Raud qui me donne envie de lire le roman d'Ariane Gélinas, et une autre, agaçante celle-là, de Max-Ross Gaudreault qui critique (à bon ou mauvais escient, peu importe !) le style d'un auteur alors même qu'il commet des fautes grammaticales grossières (par ex : "s'ensuit (sic !) les péripéties en eux-mêmes (re-sic !)).
Les Lectures, comme d'habitude, donnent des indications positives et négatives, des envies furieuses d'oeuvres d'auteurs connus ou inconnus (j'ai décidé notamment que je voulais absolument lire Johana Sinisalo, et que je voulais le Femspec !), et les lecteurs français seront ravis de lire une chronique élogieuse de Gagner la guerre, de JP Jaworski, sous la plume de Nathalie Faure.
Et bien sûr, le volet en ligne est disponible ici.