Les Chroniques de l'Imaginaire

City Hall (City Hall - 1) - Guérin, Rémi & Lapeyre, Guillaume

Londres, 1902. Le ministre des finances Downing est dans son bureau en cette soirée et il demande à ne plus être dérangé. Sa tasse de thé en main, il se dirige vers la fenêtre quand une ombre gigantesque lui cache la lumière naturelle. Un poing immense traverse la fenêtre et le broie comme s'il n'était rien. La créature va ensuite terminer brûlée par son créateur, maintenant qu'elle n'a plus d'utilité.

Carlton Lester est l'inspecteur chef de City Hall. Il va être emmené sur les lieux du crime. La façade de l'immeuble semble avoir été soufflée de l'extérieur et elle est totalement noircie, comme s'il y avait eu un incendie, mais seule la façade et la rue ont subis ce traitement, pas l'intérieur des bâtiments. C'est à n'y rien comprendre. Quand, sur le corps de Downing, Lester voit une lettre, il s'en empare et demande à ce que les personnes présentes ne parlent jamais de ce qu'elles viennent de voir. Il fonce tout droit voir le maire, Malcolm Little.

Ce qu'a trouvé Lester sur le cadavre de Downing n'est tout simplement pas possible. Le papier n'existe plus depuis de très nombreuses années et les gens ne savent plus écrire autrement qu'en tapant sur des machines. En effet, ce qu'écrivaient les gens prenait vie, sans qu'ils sachent pourquoi. Au début, ils ont surtout créer des créatures qui pouvaient leur rendre service, porter leurs paquets, s'occuper des tâches ménagères. Mais, bien sûr, certains virent là le moyen de faire la guerre sans perte. Et donc une guerre éclata entre ceux qui ne voulaient pas que le papier et l'imagination soient utilisés à de mauvaises fins et les autres. La guerre fut remporté par ceux qui voulaient faire disparaitre le papier, mais il leur fallut encore de nombreuses années avant de tout brûler. La population mondiale n'est pas au courant de cette histoire, pensant que le papier n'est plus utilisé uniquement pour des raisons économiques et écologiques.

Donc, City Hall se retrouve confronté à un homme ayant accès à du papier et qui sait comment s'en servir. Pour le contrer, des méthodes traditionnelles ne seront pas suffisantes. Il va donc falloir faire appel à quelqu'un ayant une grande imagination et capable de trouver des contres à ce criminel. Un écrivain. Little va donc faire appel à Jules Verne, qui sera accompagné par son ami Arthur Conan Doyle. À eux deux, ils vont devoir affronter le plus grand criminel de l'histoire moderne, un certain Lord Black Fowl.

Rémi Guérin et Guillaume Lapeyre nous proposent avec City Hall une nouvelle histoire sous format manga. Preuve est de constater que ce type de narration, de dessin et de format en général leur convient parfaitement. Ils nous livrent une histoire qui fait preuve d'inventivité, d'originalité, avec des personnages forts et qui ne fait que débuter à nous révéler son potentiel. Le choix d'utiliser des personnages ayant réellement exister n'est qu'un détail, finalement. Cela permet de ne pas avoir à expliquer pourquoi les créatures issues de l'imagination de Verne ont toutes un aspect mécanique poussé, par exemple, mais sinon ils auraient pu s'appeler Tartampion, cela n'aurait pas changé grand-chose. Du moins pour l'instant.

L'univers dans lequel l'histoire se déroule nage dans le steampunk. Nous sommes dans un savoureux mélange de rétro et de futuriste. Le côté rétro est dominant, dans les costumes, les machines, les habitations, mais nous avons quand même des ordinateurs tels que nous n'en avons pas encore nous-mêmes de ces modèles. Le mélange est fait sans fausses notes et rien ne semble forcé. L'action est présente, dans des courses poursuite ou bien dans des affrontements de créatures issues du papier (qu'on appelle des papercut). Il y a aussi de l'humour, sans que cela soit exagéré non plus. Et, bien sûr, une enquête qui nous permet à nous lecteur de découvrir le monde et ses secrets (secrets dont Arthur Conan Doyle ne connaissait pas l'existence).

Côté dessin, c'est du tout bon. Les cases sont parfaitement utilisées comme il faut. Certaines n'ont pas beaucoup d'arrière-plan, mais cela ne donne pas une impression de vide puisque les décors, quand il y en a (et ce n'est pas anecdotique), sont détaillés et ciselés comme il faut. Guillaume Lapeyre livre ici un travail de grande qualité.

Avec ce premier tome de City Hall, on entre dans une histoire captivante qui nous promet d'être riche en rebondissements et révélations. Espérons que le prochain tome, prévu à l'automne de cette année, ne soit pas en retard et soit du même acabit que celui-ci. Si c'est le cas, cette série risque de se faire grandement remarquer.