Les Chroniques de l'Imaginaire

Place du Nord et autres lieux - Tschumy, Daniel

Dix nouvelles d'une très belle écriture forment ce recueil. De la première à la dernière, toutes ont leur mélodie personnelle, que le sujet soit léger (sport, rendez-vous amoureux) ou plus difficile (maladie, mort, accident).
Ces longues phrases, bien tournées, bien rythmées, avec très peu de dialogues (voire pas du tout), ne se prêteraient pas à un roman entier. Le lecteur aurait vite le tournis. Mais ici, le style de Tschumy donne à ses histoires une lumière, un ton et un rythme très particuliers, et très agréables à lire.

Toutes racontées à la première personne du singulier, elles ont chacune leur magie. Certaines racontent un même événement, vu par deux protagonistes différents, et c'est bien agréable de se rendre compte que la fin surprenante de Place du Nord va être le fil conducteur de Les eaux de la mer.
Deux autres nouvelles La chambre d'Eric et Eric racontent l'amitié de deux adolescents, et la méchanceté de l'un pour l'autre, vu par chacun des deux enfants, une fois parvenus à l'âge adulte. C'est très bien raconté, les sentiments de chacun sont très finement analysés.

Les grands voyageurs sont aussi à l'honneur dans L'invitation. Dehli nous emmène aussi en voyage, mais nous montre le côté sombre de l'Inde.
Dans Un crime délicieux, deux femmes attendent dans un café. Qui attendent-elles ? Le même homme ? C'est très finement raconté, et on se laisse surprendre avec plaisir par les pirouettes littéraires de l'auteur.
Les deux dernières, Trois lettres assassines et Home sont plus sombres. Le narrateur est un père de famille, un mari, qui un jour de novembre voit son monde basculer dans l'horreur quand sa femme subit un AVC. Elle survit, mais à quel prix ? A quel prix pour elle, pour son mari, pour ses deux petites filles ?
Sobre mais toujours réaliste, on ne peut qu'admirer la prouesse de l'auteur qui nous raconte cela de belle façon même si on ressent de la tristesse à la lecture de cette histoire qui parait trop bien racontée pour n'être qu'imaginaire.

Hormis La cour des grands qui retranscrit en détail le quotidien d'un joueur de volleyeur, et qui, je l'avoue, ne m'a pas intéressée, toutes sont vraiment très réussies.