Les Chroniques de l'Imaginaire

Les instruments de la nuit - Cook, Thomas H.

C'est peu de dire que Paul Graves ne s'est jamais remis de la mort de sa soeur Gwen, un an après l'accident fatal de leurs parents. Il est devenu romancier, et dans ses livres un détective intuitif mais toujours perdant, Slovak, poursuit ce psychopathe assassin qu'est Kessler, et son âme damnée, Sykes.
Un jour, Allison Davies, héritière fort riche du beau domaine de Riverwood, lui demande d'inventer une histoire pour apaiser Mme Harrison, mère d'une jeune fille très aimée d'Allison, et qui a été retrouvée morte cinquante ans plus tôt, sans que personne réussisse à l'oublier, ni à trouver son meurtrier.

L'atmosphère est prenante à tout moment, qu'il s'agisse de New York, de Riverwood, ou de la ferme familiale de Caroline du Nord, les trois lieux où se déroule le roman. La prégnance du passé où Graves continue de vivre est étouffante, et le parallèle avec ce que vivent les survivants de Riverwood est remarquable de finesse, tout en subtilité, par le passage constant et quasi-inconscient de Graves du présent de Riverwood au "passé éternel" de la Caroline du Nord.

C'est là un roman sur l'horreur, le choc, la culpabilité et la hantise, sans guère d'images brutales, tout restant davantage suggéré que dit, roman noir aussi, de l'innocence perdue qui ne peut déboucher que sur le désespoir face à l'incompréhensibilité du Mal. Tous les personnages, à l'exception possible d'Eleanor, ont été brisés à un moment de leur vie, et semblent être restés figés à ce moment traumatique. Cela leur donne ces caractéristiques un peu fantomatiques, un peu artificielles, qui permettent au lecteur attentif de repérer les mensonges enfouis. Riverwood, au départ présenté comme un paradis terrestre, prend peu à peu le visage d'une caricature créé par le diable lui-même.

Originale dès ses prémisses, cette histoire qui ne permet à aucun moment à l'attention de se détourner se révèle un excellent moment de lecture, que je ne peux que recommander fortement.