Les Chroniques de l'Imaginaire

La stratégie Ender (Ender - 1) - Card, Orson Scott

Les extra-terrestres, surnommés par les humains "les doryphores", sont l'Ennemi, tant et si bien que les deux blocs d'influence qui se partagent la planète Terre se sont unis dans leur lutte commune contre lui, et ont créé la Flotte Internationale (F.I.). Quatre vingts ans plus tôt, Mazer Rackham a réussi, sans qu'on sache trop comment, à stopper la seconde invasion. Depuis, la F.I. cherche un enfant qui soit capable de devenir un autre Mazer.

Après avoir cru un moment que Peter Wiggin en serait capable, et avoir renoncé à cet espoir étant donné les particularités du caractère de Peter, après avoir constaté à regret que sa soeur Valentine était à écarter pour les raisons exactement opposées, ils ont autorisé leurs parents à concevoir un troisième enfant, Andrew. Aussi supérieurement intelligent que ses aînés, il semble avoir les qualités de l'un et de l'autre, et donc représenter le plus sûr espoir de la F.I. Raison de plus pour tester à fond ses limites, et ne rien lui épargner. Et c'est ainsi que celui qui se nomme lui-même Ender arrive à l'Ecole de Guerre, à l'âge de six ans.

Ecrit à l'époque de la guerre froide, ce roman qui paraîtra "daté" sur le plan des intrigues politiques terriennes aux lecteurs plus âgés, n'aura sans doute pas cet inconvénient pour les lecteurs nés après l'effondrement du mur de Berlin et l'éclatement du bloc de l'Est. Et de toute façon, l'histoire est suffisamment originale et puissante pour éviter que cet élément somme toute mineur l'obère en quoi que ce soit.

Il est difficile de se souvenir, quand on le lit, que les enfants dont il est question, à commencer par Ender lui-même, sont précisément des enfants. En même temps, l'auteur nous aide à le faire en rappelant à intervalles réguliers que pour eux il s'agit d'un jeu (c'est le sens du titre original : Ender's game). Et chacun sait combien les enfants aiment jouer à la guerre.

Ce roman qui a plus de trente ans est assez visionnaire quant à l'usage des jeux vidéo complexes, des simulateurs, et d'ailleurs des enfants comme soldats. Les personnages sont touchants, complexes, à commencer bien sûr par les trois jeunes Wiggin. L'action ne cesse jamais, et la tension monte jusqu'à un finale étourdissant, sinon inattendu.

Toutes ces qualités expliquent la future sortie sur les écrans (en novembre 2013) d'un film tiré de cette oeuvre, sortie préparée en France par cette nouvelle édition, dans une autre traduction. C'était certainement une bonne idée que de chercher de nouveaux lecteurs à cette histoire déjà ancienne. Cela dit, je ne suis pas vraiment convaincue qu'une traduction qui arrive à des phrases aussi biscornues, voire incompréhensibles, que celle-ci Aucun de nous n'avait passé que cinq jours recroquevillés dans des pièces obscures, en plein milieu d'une guerre, ne puissent guérir (page 356) ait vraiment été impérative.