Les Chroniques de l'Imaginaire

Un château en forêt - Mailer, Norman

Le Diable, qui n'a pu assister à la naissance de Jésus, se décide de superviser, avec l’aide d’un sbire, un nouvel arrivant, un certain Adolphe Hitler. Le sbire y narre l’histoire de l’un des pires êtres humains que la Terre ait pu porter. Il y raconte sa famille, Alois le père adultérin et incestueux en proie à des crises de violence. Il raconte un enfant presque ordinaire et comment un simple sbire sur ordre du Diable lui-même en a fait un tyran.

Ce livre aurait du être le premier tome d’une trilogie de Norman Mailer mais l’auteur est mort avant de finir.

Il est une force qui se dégage de certains livres, celui-ci en fait partie. La prose de Mailer est dure, sans chichis, avec la violence que mérite une telle histoire pour vous transporter loin, très loin. Ce livre fait partie de ce genre de livres qui ne laissent pas indifférent. Il vous prend et vous amène contre votre gré dans des recoins voyeuristes de votre être. Il vous faut toujours en savoir plus et plus encore. J’ai dévoré ce livre du début à la fin.

On peut noter l’absence de marquage historique. Ceci dit, on ne sait quasiment rien sur l’enfance d’Hitler, il était donc facile d’y faire un récit. Norman Mailer a pour but de nous dépeindre un portrait romancé de ce tyran, un peu comme ce qu'il a fait avec la biographie de Marylin. Nous avons à faire ici avec un personnage de roman et non pas à l'homme tel que l'Histoire nous l'a montré.

Le récit en lui-même est glaçant, la force de Mailer réside dans le fait de vous emmener là où vous ne voulez pas aller. Alois, le père, est un bourreau, en proie à ses colères, ses vices pour les jeunes femmes et la boissons. Il est ambitieux et cette ambition inonde les désirs de ses enfants.

Le rôle du démon est sublime, présent mais pas trop. Comme si la venue au monde de ce tyran n’avait en rien affecté son rôle sur Terre. C'est pour cela qu'il vaque à ses occupations et va s'occuper de superviser la guerre en Russie. Il est présent dans la vie d’Hitler en l’aiguillant, en lui ouvrant une porte, rien de plus. Il le guide vers la ruche et Alois lui montre le gazage des abeilles. La nature du mal vit déjà en lui de par sa conception.

Ce n’est pas un livre à mettre entre toutes les mains, car polémique et dur. Mais cela reste un chef d’œuvre d’un auteur parti trop tôt.